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Libération
Récit

A Aubervilliers, des élèves privés d'eau à cause d'un problème de canalisation

En Seine-Saint-Denis, une instit alerte sur le mauvais état de son école, où la tuyauterie lâche régulièrement. La journée de mardi a été éprouvante.
Photo d'illustration. (MARTIN BUREAU/Photo Martin Bureau. AFP)
publié le 10 mars 2020 à 19h51

Lundi après-midi, un tuyau de canalisation a encore lâché. L’eau a été coupée dans le groupe scolaire Robespierre à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), qui rassemble trois écoles. 800 enfants, de la maternelle au CM2, n’avaient donc plus moyens de se laver les menottes… En pleine épidémie de coronavirus, donc.

Mardi matin, à la va-vite, la mairie a ouvert les portes du gymnase voisin: avec deux toilettes en état de marche, et un lavabo – sans savon – pour 800 enfants donc, sans compter les collégiens et lycéens qui viennent s'entraîner… «Et à côté de ça, l'Education nationale nous scande tous les jours de surtout bien veiller à laver les mains des enfants pour limiter la propagation du virus», s'étrangle une enseignante qui ne souhaite pas que son nom apparaisse et qui se dit tout à la fois «très remontée et désespérée».

«Avec le coronavirus, peut-être que cette fois, on va nous entendre»

Une panne d'eau en plein coronavirus, se dit-on, c'est la faute à pas de chance. Elle coupe : «Ah mais non. Ici, dans ce groupe scolaire, c'est notre quotidien. Il faut voir l'état déplorable des bâtiments.» Elle assure qu'en six ans dans cette école, il ne s'est pas passé une année sans qu'au moins une fois, une canalisation pète, et donc avec une coupure d'eau pendant plusieurs jours: «Ils rafistolent à chaque fois, plutôt que de vraiment réparer et ça repète ailleurs.»  La fois d'avant, raconte-t-elle, la mairie leur avait fait livrer une petite citerne, «de la taille d'une moitié de voiture» sur le parking. «Il l'avait apporté vide ! Ce matin, ils l'ont apportée à nouveau. Pleine cette fois, c'est toujours ça…» Interrogée, la mairie d'Aubervilliers promet un retour à la normale dès ce mardi soir, et reconnaît: «C'est vrai que c'est déjà arrivé, dans le passé. Nous avons de gros travaux à engager sur les canalisations. Probablement l'été prochain. Cela fera partie des propositions lors du vote du budget, après les municipales.»

L'enseignante raconte aussi «l'épisode des rats», qui ont trouvé leurs aises dans l'école. Au retour des vacances de février, «on a retrouvé notre salle des maîtres ravagée, sans électricité, les rats avaient grignoté les fils électriques et s'étaient attaqués au matériel de sport». Elle envoie une rafale des photos pour qu'on la croit. On y voit des poubelles éventrées, des murs délabrés et des seaux devant des toilettes vieillottes. «Nous avons déjà effectué beaucoup de travaux dans cette école et qui se voit vraiment, se défend la mairie. Quant aux rats, c'est un problème plus vaste qui concerne toute l'Ile-de-France. Nous appliquons un protocole d'intervention.»

L'enseignante: «C'est terrible parce qu'ici, personne ne dit jamais rien. Les parents ne se rebellent pas, et nous, les professeurs, on crie dans le vide. Alors on s'est dit qu'avec le coronavirus, peut-être que cette fois, on a une chance de se faire entendre.» Contacté ce mardi après-midi, le rectorat de Créteil indiquait être au courant de la situation, précisant que ce n'était pas de sa compétence.  L'entretien du bâti scolaire – tout comme les fournitures et donc l'approvisionnement en savon par exemple – est du ressort des collectivités locales. Le rectorat, en tant que représentant de l'Etat, doit s'assurer des conditions de sécurité et garantir la santé des élèves et du personnel. «Nous avons conjointement décidé de ne pas fermer l'école mardi, indique la mairie, en considérant que la fermeture avait un impact important pour les familles et que les mesures prises permettaient de tenir la journée.»