«Freiner» encore davantage la propagation du virus et «préserver» l'économie et l'emploi. Au lendemain de la «mobilisation générale» décrétée jeudi soir contre le Covid-19 par Emmanuel Macron, une partie de son gouvernement s'est attelée, vendredi, à préciser les nouvelles «mesures d'urgences» de lutte contre l'épidémie et ses conséquences. Après une matinée passée au ministère de l'Intérieur pour informer les préfets des consignes pour le premier tour, dimanche, des municipales (lire page 3), Edouard Philippe a annoncé au 13 heures de TF1 l'interdiction des rassemblements de plus de 100 personnes (contre 1 000 jusqu'ici). «Notre objectif est de retarder au maximum le pic» de l'épidémie, a justifié le Premier ministre, conscient que cette nouvelle directive aura «des conséquences importantes pour les théâtres, pour les cinémas». Le chef du gouvernement a, en revanche, exclu de stopper les transports en commun : «Aujourd'hui, on n'est pas du tout obligé de le faire», a-t-il assuré, rappelant que cela empêcherait les personnels soignants de se rendre à leur travail. «Nous avons discuté avec les médecins, avec les spécialistes, avec les scientifiques, qui nous disent que les inconvénients […] sont bien supérieurs aux avantages», a ajouté Philippe, avant de confirmer qu'il n'était «absolument pas question de fermer les commerces», et que la pénurie ne guettait pas.
Arrêt maladie
Pour limiter les déplacements des salariés sans paralyser l'activité, le gouvernement insiste également sur le «télétravail», inscrit dans la loi fin 2017. «Tout ce qui peut être fait en télétravail doit être fait en télétravail, a martelé la ministre du Travail, Muriel Pénicaud. Un salarié qui demande le télétravail et dont le métier le permet, c'est forcément oui.» Et s'il ne le permet pas et qu'il doit garder ses enfants puisque les établissements scolaires sont fermés à partir de lundi, il peut bénéficier sans délai de carence d'un arrêt maladie, mais dont le niveau de l'indemnité n'est pas connu. «C'est automatique, si vous avez un enfant de moins de 16 ans [18 ans pour les parents d'enfants en situation de handicap pris en charge dans un établissement spécialisé, ndlr] qui est en crèche ou école, et que le télétravail n'est pas possible», a expliqué Pénicaud. Mais s'il est «possible», difficile d'imaginer un parent avec des enfants en bas âge chez lui bosser correctement…
Pour les entreprises touchées par le ralentissement de l'économie, le Premier ministre a confirmé la mise en place d'un «dispositif ambitieux […] de chômage partiel ou d'interruption d'activité». «Ceux qui doivent interrompre leur activité professionnelle [doivent pouvoir] bénéficier d'un accompagnement de la collectivité» pour que le salarié «ne perde pas de pouvoir d'achat». Pénicaud avait assuré avant lui que l'Etat allait prendre en charge «100 %» du dispositif afin d'éviter les licenciements économiques. Jusqu'ici, 5 117 entreprises (80 000 salariés) en ont fait la demande. Soit un coût de 241,8 millions d'euros. Une ardoise qui va s'alourdir…
Indemnité
Et cela ne veut pas dire que les salariés toucheront, eux, «100 %» de leur salaire. Car selon le ministère du Travail, les personnes au smic percevront bien l'intégralité de leur paie mais pas ceux qui gagnent davantage et ne sont pas couverts par un accord de branche ou d'entreprise : la loi oblige les sociétés à ne verser, au minimum, qu'une indemnité de 70 % du salaire brut (84 % du net). Pourtant, côté Bercy, Bruno Le Maire, expliquait vendredi qu'«aucun salarié ne perdra un centime». Le ministre de l'Economie et des Finances a en outre rappelé que les entreprises et associations qui en ont besoin peuvent «étaler» leurs «charges sociales et fiscales», qu'elles auront droit à des «dégrèvements», et peuvent s'appuyer sur une BPI prête à garantir «90 % des prêts aux PME». Combien de milliards la France est-elle prête à mettre sur la table ? «On verra, a temporisé Philippe. Les questions de financement viendront après.» Tout comme les décisions sur les réformes de l'assurance chômage et des retraites que les syndicats espèrent voir repoussées. «On est sur les mesures d'urgence, a répondu Pénicaud vendredi. Les retraites […] ce n'est pas l'urgence.»