Premiers à répondre : trois colocataires. Hiurma, Nadir et Paul, 25 ans pour elle et 28 pour les autres. Les voilà enfermés dans un appart de 100 mètres carrés, près des Buttes-Chaumont, dans le XIXe arrondissement parisien. Leur quatrième coloc rentre mercredi d’Indonésie. Nadir est en télétravail, Hiurma au chômage technique, et Paul au chômage tout court.
«Vendredi soir, on est sortis dans un bar, en sachant que ce serait certainement la dernière fois. Samedi, au réveil, on s’est dit : "Ok, maintenant on arrête, c’est du sérieux." On se confine vraiment. On est sorti faire les courses, de quoi tenir quinze jours. Ah oui, et aussi de rendre la console de jeux à un pote, le truc vital pour le confinement. C’est à peu près tout. Avec le recul, on regrette de pas avoir eu la jugeote d’aller acheter un ou deux meubles qui manquaient pour mieux aménager l’appart. De passer chez le coiffeur aussi. Mais bon. En vrai, on le vit bien. ça ne fait que trois jours, remarque.
«Disons que pour l’instant, on ne se marche pas dessus. L’appartement est agréable, on fait tous plus attention à ce qu’il soit clean pour s’y sentir bien. On a un petit balcon pour fumer tranquille, prendre l’air, discuter avec les voisins, regarder la rue en bas.
«Et puis, on fait des trucs qu’on ne fait pas d’habitude. Du rangement par exemple, on a optimisé l’espace dans la cuisine pour mieux agencer les machines à jus et autres qu’on avait chacun rapportés. On a que ça à faire, faut dire.
«En fait, depuis deux jours, on prend tous plus le temps. De parler, de prendre des nouvelles aussi des potes, de discuter vraiment. On s'est fait un appel à 10 sur Skype, à 18 heures, comme quand on sort du boulot, c'était marrant. Tant que les serveurs Internet tiennent, ça va. Par contre, les applis comme Tinder [site de rencontres, ndlr], ça c'est mort. Il y a des tentatives de cyberdates, mais bon…
«On a chacun des projets : se remettre à la guitare, s’immerger dans la culture japonaise… Le coup des quinze jours, c’est pas très crédible. Le Président a dû dire ça pour ne pas affoler les gens. Mais ce ne serait pas raisonnable de lever le confinement si vite. Pour moi, les quinze jours, c’est un CDD renouvelable. Surtout quand on regarde par la fenêtre et qu’on voit tous ces gens dans la rue. Si tout le monde ne joue pas le jeu, le confinement va durer plus longtemps.»