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Etat d'urgence

Urvoas : «Les députés auraient pu se doter de leur propre conseil scientifique»

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Spécialiste des questions constitutionnelles, l'ancien garde des Sceaux (PS) estime que le gouvernement devait prendre des mesures contre l'épidémie de Covid-19, même si elles portent atteinte à nos libertés. Mais il juge légitime et nécessaire que le Parlement exerce sa mission de contrôle.
Portrait de Jean-Jacques Urvoas, à Paris en 2017. (Manuel BRAUN/Photo Manuel Braun pour Libération)
publié le 24 mars 2020 à 7h56

Ancien garde des Sceaux et ex-député (PS) du Finistère, Jean-Jacques Urvoas a présidé la commission des lois de l’Assemblée nationale de 2012 à 2016.

La loi votée dimanche prévoit un état d’urgence sanitaire. Qu’en pensez-vous ?

De prime abord, au regard des mesures qu'avait prises le gouvernement sur la base d'arrêtés, je ne voyais pas l'utilité d'une loi. Mais ces arrêtés se fondent sur l'article L. 3131-1 du code de la santé publique qui n'a jamais été soumis au Conseil constitutionnel. Le gouvernement a donc voulu donner une base juridique solide à ces mesures en créant un régime pérenne d'«état d'urgence sanitaire». Il aurait pu se contenter d'un dispositif plus restreint, limité à la crise du coronavirus, mais comme le disait Anatole France, «la France n'a pas d'Etat, elle n'a que des administrations». C'est l'attitude classique des administrations juridiques qui consiste à prôner des catégories générales. Sur le plan politique, c'est plus sensible et cela a généré des polémiques à l'Assemblée sur la protection des droits fondamentaux, c'est dommage.

L’état d’urgence sanitaire a-t-il été assez encadré pour garantir ces droits constitutionnels ?

Sur le strict plan du droit, pour la première fois en temps de paix, un texte contient des mesures susceptibles de porter atteinte à la liberté d'aller et venir de toute la population. Ces atteintes sont phénoménales mais proportionnées et justifiées au vu de la menace sanitaire décrite. Il fallait les décider mais il est légitime que le Parlement veuille les contrôler. Cette exigence a été portée par des parlementaires : cela ne vient jamais du gouvernement ! Comme souvent depuis trois ans, c