Depuis des années, Marc dort sur le canapé du grand salon. Pas assez de place dans les chambres. A 21 ans, c'est lui l'aîné. Parfois, il rentre tard. Ou veille. Ou ressort la nuit pour fumer : «Parfois, tu veux regarder un film tout seul. Et le salon à partir de minuit, dans le noir, c'est la liberté. Pas de bruit, personne pour te demander ci ou ça.» Le T4, dans un HLM des Hauts-de-Seine, rétrécit quand toute la famille y est : ils sont sept dedans, en comptant les parents.
L'étudiant dit que chacun, du plus vieux au plus petit, avait naturellement trouvé un équilibre. S'arranger avec l'étroitesse, trouver ses moments, laisser souffler les autres. Le confinement imposé remet tout à plat. «A minuit, mon petit frère et ma petite sœur ne dorment pas encore. A 8 heures du matin, ma mère fait des va-et-vient à la maison. Sur le canapé, je dérange.» Le père tourne en rond au sens propre du terme. Il squatte les fenêtres, devient obsédé par le rangement, scrute les sorties en les limitant à quinze minutes. «Il a peur de la maladie, il ne bouge plus. Dès que tu te déplaces, tu tombes sur lui. Il galère entre quatre murs. Parfois, la porte d'une chambre est fermée, il va l'ouvrir sans frapper…»
Normalité inversée
Le coronavirus a décrété l'extérieur irrespirable, alors que celui-ci est le ballon d'oxygène pour des familles nombreuses dont la définition n'a jamais été aussi spatiale. A Evry (Essonne), une mère de quatre enfants fait des divisions : «C'est la superficie qui