Anthony, 30 ans, vit avec sa compagne Calypso, 32 ans et enceinte de leur deuxième enfant, et leur fille Livy, six ans, dans un petit village du Lot-et-Garonne, entre Agen et Marmande. Dans cette campagne où ils ont tous les deux grandi, le confinement bouleverse peu leurs habitudes.
«Je suis maraîcher sur sol vivant, je travaille dehors toute la journée sur les trois-quatre hectares que nous possédons autour de la maison. Le confinement, ici, ça ne change pas grand-chose. Je sème, je cultive des radis, des poireaux, des choux chinois, des betteraves roses… Là, je suis un peu emmerdé par les vers en train de manger mes salades, des variétés anciennes. J'ai aussi des cochons, des moutons qui me servent à tondre ma pelouse, une quarantaine de poules pour nettoyer la terre.
«Ma fille est en grande section, elle a quelques exercices à faire, dessine beaucoup. Depuis qu'elle n'a plus école, elle vient tous les jours m'aider à la serre que j'ai installée y a un mois et demi. Elle fait le tour des animaux, regarde les papillons. Je la vois prendre son autonomie, elle va ramasser les œufs. On mange ce que je cultive, il nous reste encore des conserves du jardin de l'été dernier. On a de quoi vivre. Pour les pâtes, le riz, on commande en «drive». On ne va plus trop chercher le pain, je vais juste acheter mon tabac.
«"Caly" est enceinte, c'est pas toujours facile. Sa famille vit un peu plus loin, d'habitude elle a tendance à prendre sa bagnole pour y aller. Là, t'as pas le choix. Les nouvelles s'échangent par téléphone ou WhatsApp. C'est aussi dans ces moments-là qu'on voit les vrais copains, ceux qui prennent des nouvelles. Ici, on ne croise plus personne. Quand tu sors devant la maison, tu ne risques pas de tomber sur quelqu'un.
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«Il y a un tel silence… On n'entend plus le brouhaha familier des habitations au loin, ni les voitures sur l'autoroute passant en contrebas de chez nous. Parfois quelques camions. Même les avions de la base aérienne du coin volent moins. Dimanche, y avait plus un bruit, c'était un truc de fou. C'était magnifique. J'entends les mésanges, le vent.
«Ça fait longtemps que je réfléchis à ce qu'il peut se passer. Je lis, j'écoute des trucs sur l'effondrement. Avec ce qu'il nous arrive, t'es obligé de te repositionner dans un monde où tu te dis que c'est peut-être pas toi qui gères tout. Macron dit qu'il écoute les scientifiques pour prendre ses décisions, j'aimerais bien qu'on écoute aussi ceux qui parlent du climat, de la biodiversité. Si on repart comme avant, c'est foutu.»