«On se tutoie ?» me demande Jüne Plã quelques secondes après m'avoir fait entrer. Sa voix enjouée s'accorde avec l'enthousiasme souriant qui émane de son corps menu, lui donnant un air juvénile accentué par ses cheveux décolorés, coiffés court et déstructuré. Je suis surprise quand elle me dit qu'elle a 36 ans. Je lui en aurais donné trente. En venant, j'étais confiante : je savais qu'assises dans son salon, calme et bien éclairé par la froide lumière d'un après-midi pluvieux, nous parlerions entre féministes convaincues du fait qu'on peut réinventer son corps et sa sexualité.
En recevant une semaine plus tôt son livre, Jouissance Club, je l'ai d'abord ouvert au hasard. Je suis tombée sur un passage où celle qui a commencé sur Instagram explique comment s'amuser à cracher sur le sexe des partenaires de minces filets d'eau pétillante, qui accroissent le plaisir. Et puis, les premières pages m'ont séduite : le ton résolument féministe qu'elle assume sans complexe, son usage de l'écriture inclusive - pourtant si rarement acceptée -, son humour aussi dévoilaient l'énergie bienveillante de son auteure.
La sortie de l'ouvrage, déjà vendu à plus de 50 000 exemplaires, clôt une année de labeur : la character designer de métier y a travaillé tous les soirs, après sa journée de travail, dessinant le jour des personnages de jeux vidéo, esquissant la nuit des vulves, des pénis, des mains, des doigts. Jamais de visages : «Je ne veux pas associer un visage à u