Les résidents des Ehpad sont l’angle mort de cette crise sanitaire, ceux qu’on avait oubliés et dont on découvre soudain qu’ils pourraient être les premières victimes du Covid-19. Pour deux raisons : leur âge élevé, synonyme d’organisme fragilisé, et leur vie en collectivité. Qu’un seul soit touché et tous les autres deviennent de fait des cibles privilégiées du virus. Les premiers chiffres des décès remontés du terrain font frémir et gonflent sérieusement le nombre des morts de l’épidémie en France. Il suffit de lire le journal de bord que nous publions dans ces pages pour comprendre l’ampleur du drame qui se joue derrière les murs désormais clos de ces maisons de retraite. Rédigé par un médecin spécialisé, il décrit sans fioritures la course permanente contre la mort. Certains passages sont à la limite du soutenable mais la situation de ces établissements ne s’améliorera certainement pas si nous ne regardons pas la réalité en face. Individuellement et collectivement, car nous sommes tous concernés. Grâce à cette médiatisation, une prise de conscience a eu lieu, des mesures ont été appliquées pour aider les responsables des Ehpad, trop souvent abandonnés à eux-mêmes. Ceux-ci sont désormais informés en continu et surtout pris en compte dans le grand maelstrom de la crise. Leurs problèmes sont légion : vaut-il mieux laisser ces résidents mourir de désespoir (car enfermés dans leur chambre) ou du Covid-19 ? Comment répartir le peu de masques disponibles entre personnels et résidents, et jongler avec les quelques tests octroyés ? Comment rassurer des soignants venant travailler la peur au ventre ?
L’Ehpad est le dernier maillon de la chaîne dans la grande crise de l’hôpital, il en subit tous les effets (manque de moyens, manque de personnel, manque de considération) en démultiplié. C’est peut-être le moment de répondre à ses besoins et ses attentes. Si ce n’est aujourd’hui, alors impérativement demain, au sortir de la crise.