Comment organiser le déconfinement indispensable à la remise en marche de l’économie sans risquer une nouvelle flambée épidémique ? Alors que l’exécutif planche désormais activement sur la question, l’Académie nationale de médecine a tenté ce mardi de préempter le débat en rendant publique ses propres recommandations. Façon aussi pour la société savante d’écarter une piste examinée avec intérêt en haut lieu : un déconfinement différencié dans le temps, en fonction des classes d’âge.
Cette hypothèse se nourrit d’un constat simple : les personnes âgées étant les plus gravement touchées par le coronavirus, il conviendrait de les protéger le plus longtemps possible en les laissant confinées ; a contrario, les plus jeunes pourraient reprendre plus vite le cours normal de leur existence, sans menace véritable pour le système sanitaire. Selon l’entreprise française de conseil Public Health Expertise, spécialisée dans la modélisation de stratégies médicales, un déconfinement retardé de trois mois pour les plus de 65 ans ferait ainsi près de dix fois moins de morts qu’une levée complète du confinement. Mais pour les plus anciens, un tel isolement prolongé relèverait de la double peine.
Liberté de circulation conditionnelle
Selon l'Académie de médecine, mieux vaut s'appuyer sur la géographie plutôt que sur le nombre des années. Elle recommande donc que «la sortie du confinement soit décidée sur la base de la région et non par classe d'âge». Un choix que la société savante assortit de conditions drastiques. Ainsi, pour éviter tout risque de saturation des hôpitaux, elle recommande que «cette sortie ne soit autorisée que dans les régions dans lesquelles une décroissance nette du nombre des patients Covid-19 devant être hospitalisés et un retour des besoins de réanimation à l'état pré-épidémique sont observés». En Ile-de-France, région névralgique pour l'économie nationale et particulièrement touchée par le coronavirus, on en est loin.
Mais ce n'est pas tout : «Les personnes résidant dans une région en sortie de confinement» ne devraient alors «pas être autorisées à se rendre dans une région encore en situation de confinement», poursuit l'Académie, ajoutant que «la décision concernant les régions frontalières [doit être] prise en concertation avec les Etats voisins». En clair, il s'agirait d'instaurer une liberté de circulation conditionnelle, en fonction de la situation sanitaire des régions. On peut s'interroger sur la pertinence épidémiologique d'une telle recommandation fondée sur un découpage administratif infranational, le virus ignorant toute frontière. Mais plus encore, sur sa praticabilité. Sauf à suivre chaque Français à la trace…