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Libération
JOURNAL DE BORD

«Chaque soir, à 20 heures, je pense: "vous applaudissez l’exploitation"»

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Un homme applaudit les soignants à 20 heures, à Paris le 25 mars. (LUDOVIC MARIN/Photo Ludovic Marin. AFP)
par Sylvie , psychologue en Occitanie
publié le 11 avril 2020 à 17h47

Avant même le début du confinement, elle avait commencé à écrire, à tenir un récit sur un quotidien inédit qui s’annonçait. Elle n’a plus arrêté. Sylvie, qui ne souhaite pas révéler son identité complète pour ne pas mettre ses collègues dans l’embarras et compliquer son travail auprès de l’hôpital qui l’emploie en Occitanie, est psychologue. Elle raconte son vécu au long cours, sa pratique de professionnelle de la santé, auprès des patients et des soignants immergés dans la pandémie du Covid-19 qui a tout chamboulé, à commencer par les liens entre êtres humains.

Vendredi 13 mars, 15h30

L’arrivée de l’épidémie de Covid-19 est annoncée, toutes les équipes doivent réfléchir à la réorganisation de leurs services. Nous nous y attendions et pourtant nous sommes saisis par le moment. Quelles sont les justes mesures ? De toute évidence, la protection de nos patients. Je travaille dans un service hospitalier de consultations ambulatoires, dans le champ des addictions : à partir de lundi nous ne recevrons plus nos patients sur place. Beaucoup sont fragiles à plusieurs égards : problèmes de santé, précarité sociale, et l’hôpital sera le premier lieu de contamination. Nous continuerons à être un lieu d’adresse, d’hospitalité, de soin, de prévention. Nous continuerons par téléphone.

Lundi 16 mars, 13h45

Les patients comprennent bien l’annulation des rendez-vous et acceptent pour beaucoup les consultations téléphoniques. Souvent, ils nous disent qu’ils s’y attendaient. D’autres préfèrent se suspendre eux aussi dans ce temps du confine