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Libération
Le portrait

Wahida Benayad Kahloul, côté cœur

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Cette auxiliaire de vie raconte son quotidien à Mulhouse, alors que la pandémie illustre l’importance de son travail souvent méprisé.
(Photo Pascal Bastien pour "Libération")
publié le 16 avril 2020 à 17h11

Dans sa voiture, elle n'écoute plus les infos, elle met la musique à fond, du rap, du hip-hop, Marvin Gaye, cela lui donne du courage : «Je sais que je peux avoir ce virus, mais il ne va pas m'arrêter. Il y a des gens qui sont seuls, ils n'ont que nous pour les repas, la toilette.» Wahida Benayad Kahloul est auxiliaire de vie à Mulhouse (Haut-Rhin) au sein du réseau associatif APA. Elle aimerait éviter de donner son numéro de téléphone, ne pas s'attacher. Mais elle connaît la tragédie de nos aînés, elle côtoie leur intimité, elle est aux premières loges de ces drames feutrés. Des histoires, elle en a plein à raconter. Comme cet Italien de 90 ans qui pleure devant son épouse alitée. Mais le bel Italien est parti avant sa femme, emporté par le coronavirus. Sa fille lui a raconté : «Ils ont laissé papa en pyjama et l'ont enfermé dans un sac plastique.» «Il méritait mieux que ça, poursuit l'auxiliaire de vie, tous méritaient mieux que ça. Il aurait pu vivre encore quelques années

Wahida Benayad Kahloul est de celles et ceux qui donnent beaucoup et gagnent peu. A temps partiel, elle travaille 27 heures par semaine, perçoit 950 euros par mois. En prime, elle doit parfois subir des propos racistes : c'est arrivé deux fois. Et quand la couleur de peau de ses collègues est trop foncée, la porte d'entrée reste carrément fermée. Elle dit : «On ne va pas se mentir, dans ce métier ce sont essentiellement des femmes avec des origines.» Parfoi