La moitié de l'équipage du porte-avions et de son escorte est contaminée par le Covid-19. Soit très exactement 1 081 marins positifs sur les 2 010 tests dont les résultats sont aujourd'hui connus (l'ensemble compte 2 300 militaires). Le chiffre a été annoncé vendredi après-midi par la ministre des Armées, Florence Parly, lors d'une audition devant les députés de la commission de la défense. Parmi les porteurs, 545 présentent des symptômes, et 24 sont hospitalisés, dont un en réanimation.
Ces nouvelles données confirment l'ampleur de la contamination à bord du Charles-de-Gaulle, bâtiment de loin le plus touché. «La contamination du porte-avions est un événement absolument majeur», a reconnu au Sénat la cheffe du service de santé des armées, Maryline Gygax Généro. La dégradation était telle que le vaisseau amiral de la marine nationale française a dû rentrer plus tôt dans sa base de Toulon alors qu'il était en opération dans le nord de l'Atlantique, après s'être déployé dans l'est de la Méditerranée de fin janvier à début mars.
Florence Parly a assuré avoir pris la décision de raccourcir la mission le jour où elle a été informée «pour la première fois» de la présence de plusieurs cas symptomatiques à bord, donc le 7 avril, a-t-elle précisé. Une réponse en creux aux accusations qui se sont multipliées ces derniers jours sur la gestion de la crise par la hiérarchie : plusieurs médias ont affirmé que le ministère avait donné l'ordre de poursuivre la mission malgré les premières alertes, et que le commandant du porte-avions, Guillaume Pinget, avait lui-même demandé son interruption après l'escale à Brest du 13 au 16 mars. Ce qu'il a démenti et que Florence Parly a elle aussi formellement démenti devant les députés.
Soupçons sur l’escale à Brest
Cette pause de trois jours dans le Finistère concentre tous les soupçons. Comme nous l'écrivions hier, l'équipe médicale du Charles-de-Gaulle avait recommandé de l'annuler, en vain. Elle a été maintenue, a dit Florence Parly, «sur décision du commandement opérationnel de la marine nationale, pour des raisons logistiques et pour des besoins de régénération de l'équipage».
Auparavant, le bateau n’avait touché terre qu’à Chypre du 21 au 26 février, et n’a pas accosté après. A Brest, les marins ont pu descendre du bateau et dormir chez eux en famille. Les cas se sont ensuite multipliés à bord. Certains avaient-ils été détectés avant, comme l’ont affirmé des marins sous couvert d’anonymat ? Aucun député de la commission de la défense n’a posé la question à la ministre des Armées.
Celle-ci s'est engagée à rendre publiques les conclusions des deux enquêtes lancées pour comprendre comment le Covid-19 a pu neutraliser le plus important bâtiment de la marine nationale française. «L'enquête épidémiologique devra faire la lumière sur l'enchaînement qui a conduit à la propagation du virus au sein de ce cluster très particulier. En parallèle, l'enquête de commandement permettra de voir quelles décisions ont été prises et comment les mesures de précaution et de détection qui avaient été prescrites ont été appliquées», a déclaré Florence Parly, promettant des résultats, ou à défaut un point d'étape, dans deux semaines.