Elle a beau illuminer la nuit, on dirait un vaisseau abandonné. Portiques de contrôle ouverts, agents d'accueil SNCF absents… D'ordinaire, la gare de Juvisy-sur-Orge, au sud d'Orly, est aux banlieues sud de Paris ce que la station Châtelet est à la capitale. Un gros hub. Deux RER (C et D), 28 lignes de bus et 140 000 voyageurs par jour en font la plus grande gare d'Ile-de-France - après les gares parisiennes. Aujourd'hui, on n'y croise plus que ces travailleurs de l'ombre pour qui le confinement ou la voiture ne sont pas des options. Libération est allé à leur rencontre, aux heures de départ pour le boulot, et de retour.
5 h 20. Farid, 38 ans, vapote dans son coin en attendant le train Lope de 5 h 34. Employé dans la restauration collective au sud de Paris, il se lève une heure plus tôt en raison du ralentissement du trafic (entre 75 % et 80 % de trains en moins). «Je prends le premier bus à 5 heures à Draveil. L'avantage, c'est qu'il y a moins de monde», tempère-t-il. Abrités d'un vent glacial derrière un distributeur de boissons, Lætitia et Alexandre, 26 et 30 ans, sont, eux, venus de la commune voisine de Savigny-sur-Orge, à deux sur un vélo pliant. «C'est tout ce qu'on a trouvé depuis les changements d'horaires», ironise Alexandre, short baggy en