Lucie et Alexandre, 21 ans, sont élèves en classe préparatoire aux grandes écoles de commerce dans un lycée parisien. Le confinement a chamboulé leur année scolaire alors que s'amorçait la dernière ligne droite avant les concours.
«Nos parents, les uns à Sète, les autres à Vichy, nous ont bien proposé de rentrer. Mais on a préféré se confiner ensemble : on a envie de les voir, mais surtout d'avoir les concours. Là, comme on "cube" [redouble, ndlr], ça fait trois ans de prépa, on veut que ça s'arrête… On est confinés chez Alexandre : mon appartement ne fait que 18 m2, avec à peine la place pour travailler, or les bibliothèques où on révise d'habitude sont toutes fermées. C'était inconcevable de rester enfermée dans ces conditions. Là, on a 40 m2, ça change la donne. Il y a une mezzanine, on peut avoir des moments chacun de son côté.
«Dans les prépas de notre lycée, beaucoup sont rentrés dans leurs familles, mais beaucoup ont fait aussi comme nous, généralement en plus grand nombre. Nous, comme on se connaît bien, qu’on est amis et qu’on a travaillé toute l’année ensemble, on savait que ça allait bien se passer, qu’il n’y avait pas trop de risques de clash. Mais bon, potentiellement, ça aurait quand même pu exploser. Il y a bien eu deux ou trois altercations mais rien de grave, il a suffi d’une heure pour que tout rentre dans l’ordre.
«On se soutient, dans ces révisions qui n’en finissent pas. Là, en temps normal, la phase des concours serait ouverte. On a appris hier qu’elle est remise à fin juin… Donc, au lieu des trois semaines de révisions habituelles, on a trois mois. Le sprint final s’est transformé en course d’endurance. On pourrait penser que c’est une chance, que ça donne plus de temps pour réviser, mais on a plutôt l’impression que la motivation baisse, un sentiment d’usure. On n’arrête pas de bosser, toutes les matières, tous les jours… Mais bon, au moins on a une date, ça se concrétise.
«On respecte le confinement : on ne sort que pour faire les courses, ensemble, environ tous les dix jours. Le plus pesant, c’est que sortir soit interdit, sauf motif spécifique. Avant, on n’avait déjà pas une vie socialement éclatante mais on pouvait au moins voir d’autres gens, et le trajet jusqu’à la bibliothèque était en soi un petit plaisir… Et nos familles nous manquent. Mais on ne va pas craquer maintenant ! Et ce qui est clair, c’est que nos liens amicaux se sont renforcés.»