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Checknews Des visières à la pollution, vos questions nos réponses

publié le 24 avril 2020 à 20h01

Libération met à disposition de ses lecteurs un site,CheckNews, où les internautes sont invités à poser leurs questions à une équipe de journalistes. Notre promesse : «Vous demandez, nous vérifions.» A ce jour, notre équipe a déjà répondu à plus de 4 800 questions.

Quelle est  la mortalité des malades du Covid-19 en réanimation ?

Le 17 avril, le directeur de la santé, Jérôme Salomon, a donné des premiers éléments sur le destin des malades atteints de Covid-19 entrant en réanimation. «Le taux de mortalité n'est pas de 50 %, comme je l'ai lu dans certains documents, mais plutôt de 10 %.»

Ce chiffre représente en réalité un taux très provisoire, loin d’illustrer la situation, à terme, des patients placés en «réa». Le directeur de la santé tire ainsi cette statistique du point épidémiologique de Santé publique France du 16 avril, dont un tableau relate sur un peu moins d’un mois (du 16 mars au 12 avril) la situation des Covid + au sein de ces services. Sur 2 806 patients présents en réanimation sur cette période (dans 144 services), 291 sont décédés. Soit, effectivement 10,37 %, le chiffre que retient le directeur général de la santé. Mais on apprend également que 735 personnes en sont sorties et, surtout, qu’il en reste 1 780, qui y sont entrées à des dates différentes au cours de ce mois, et dont le statut final n’est pas encore connu. Dans la mesure où certaines vont guérir et d’autres décéder, il est impossible d’affirmer que le taux de mortalité en réanimation est de 10 %.

Un document interne de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) du 7 avril relatif au Covid, que CheckNews a pu consulter, s'intéresse, lui, à un groupe de personnes placées en même temps en réanimation. Il en ressort, au 7 avril, que sur 1 589 y étant entrées le 28 mars en Ile-de-France, 252, soit 15,9 %, étaient décédées après dix jours. Sur un groupe plus petit (on est alors au début de l'épidémie) placé en réanimation à l'AP-HP le 18 mars, la mortalité atteint, au 7 avril, soit vingt jours plus tard, 27,4 %.

On peut donc déduire de ce document que le taux de mortalité en réanimation s'élève, pour ces groupes, à près de 16 % après dix jours et à plus de 27 % après vingt jours. Contacté, l'AP-HP indique que la cohorte du 18 mars, qui en est désormais à J + 34, a même atteint un taux de mortalité de 31 %. Mais là encore, il ne s'agit pas du taux définitif, puisque 18 % des patients de ce groupe sont toujours en réa. «Au global, on devrait être, au niveau national et en moyenne, et à l'issue de la crise, à un taux compris entre 30 % et 40 % de mortalité en réanimation», estime l'AP-HP. L.P.

Les visières en plastique constituent-elles  une protection efficace ?

Habituellement utilisés sur les chantiers, les masques à visière en plastique sont parfois considérés par la population comme une alternative aux masques plus classiques, alors que les protections grand public tardent à être généralisées. Pour l'INRS, organisme dédié à la santé et la sécurité au travail, ces masques ne font pas office d'une protection respiratoire. Il s'agit «d'équipements de protection des yeux et du visage. […] S'ils peuvent protéger les porteurs des grosses gouttelettes émises immédiatement après une toux par une personne à proximité et face à l'écran, ils ne permettent pas de protéger des particules restant en suspension». Hors de question, donc, d'utiliser ces masques en milieu hospitalier sans les associer à une protection respiratoire. En revanche, leur visière permet de les ajuster sans toucher son visage. Ce qui n'est pas le cas avec les masques en tissu.

Partout ailleurs, ces «écrans faciaux ne peuvent être utilisés qu'en complément des mesures collectives, organisationnelles et d'hygiène». Comprendre : ces outils ne doivent surtout pas conduire à s'affranchir des gestes barrières et de la distanciation sociale. A.C.

Quelles sont les régions dans lesquelles le taux de contamination est le plus important ?

Au 11 mai, date prévue du déconfinement, 5,7 % des Français auront été en contact avec le coronavirus. C'est-à-dire qu'ils seront contaminés ou l'auront été. C'est le résultat d'une étude de l'Institut Pasteur publiée mardi. A partir des données disponibles, et au moyen d'une modélisation mathématique, les chercheurs arrivent à ce résultat qui demeure très éloigné du taux de 70 % à partir duquel on atteindrait l'immunité collective. Et les auteurs de déduire qu'une levée du confinement sans garde-fou aurait comme conséquence de relancer l'épidémie.

Autre enseignement de la publication : le taux de contamination varie fortement selon les régions. En Ile-de-France, 12,3 % des habitants auront été en contact avec le virus le 11 mai, contre seuls 1,4 % des habitants de la Nouvelle-Aquitaine. Voici, du plus faible taux d'infection au plus fort, les projections pour chaque région : 1,4 % en Nouvelle-Aquitaine ; 1,8 % en Bretagne ; 1,9 % en Pays-de-la-Loire ; 2,6 % en Normandie ; 3,1 % en Centre-Val-de-Loire ; 3,1 % en Occitanie ; 3,4 % en Provence-Alpes-Côte-d'Azur ; 4,4 % en Auvergne-Rhône-Alpes ; 5,4 % en Corse ; 5,7 % en Bourgogne-Franche-Comté ; 6,1 % dans les Hauts-de-France ; 11,8 % dans le Grand-Est ; 12,3 % en Ile-de-France. C.M.

Est-il vrai que la pollution à Paris n’a pas diminué pendant le confinement ?

«Logiquement, avec […] l'arrêt d'une bonne partie de l'activité économique et la baisse spectaculaire de la circulation automobile […], la qualité de l'air aurait dû considérablement s'améliorer (en région parisienne). Il n'en est rien…» affirme un article publié par la revue Transitions  & Energies, repris par Causeur (avec qui elle partage son directeur de publication, Gil Mihaely).

Le journaliste s’appuie sur l’indice Citeair mis en ligne par Airparif, qui surveille la qualité de l’air en Ile-de-France. En mars et depuis début avril, la région a connu plusieurs épisodes de pollution, dont un pic le 28 mars.

Est-ce à dire que la qualité de l'air ne s'est «pas vraiment» améliorée depuis le 17 mars ? Pierre Pernot, d'Airparif, explique : «C'est le polluant qui a l'indice le plus fort qui va donner l'indice final. Ainsi, si les effets du confinement sont sur un autre polluant, cela ne va pas se voir. Quand on regarde l'impact d'un événement, il faut le faire polluant par polluant.»

Par ailleurs, «il faut comparer avec les mêmes conditions météo, les mêmes activités, la même chimie dans l'atmosphère, et la même pollution qui provient d'ailleurs». Bref, les comparaisons doivent s'effectuer non pas entre deux périodes mais sur une même période en établissant un scénario sans et un avec l'événement dont l'impact est étudié (ici, le confinement).

Dans son bilan du 17 mars au 6 avril, Airparif effectue des comparaisons entre «une situation normale et les trois premières semaines d'application du confinement, avec des conditions météo comparables». Et observe bien des effets positifs : «Une amélioration conséquente de la qualité de l'air pour le dioxyde d'azote (polluant local principalement émis par le trafic) de - 20 % à - 35 % selon les semaines», et «une diminution des rejets dans l'atmosphère de dioxyde de carbone (CO2), estimée à près de 30 %».

En revanche, l'impact est «moindre pour les particules (PM10 et PM2,5), dont les sources sont à la fois plus nombreuses et pas seulement locales». C'est ce qui est visible avec l'indice Citeair. La baisse du trafic n'a pas compensé les émissions liées au chauffage résidentiel et aux activités agricoles, ni l'impact de la météo printanière. E.D.

Où sont passés les 1 081 marins contaminés du «Charles-de-Gaulle» ?

L’annonce a été faite le 17 avril : 1 081 marins du porte-avions ont été contrôlés positifs au Covid-19. Cette épidémie a contraint le vaisseau amiral de la marine nationale française à rentrer plus tôt que prévu à Toulon, sa base.

Qu'est-il advenu de ces marins ? Sur son site, le ministère des Armées affirme que «tous les marins sont actuellement pris en charge et confinés au sein d'emprises militaires et font également l'objet d'un suivi médical quotidien par le Service de santé des armées». Deux d'entre eux sont en réanimation à l'heure où nous écrivons ces lignes. Une enquête de Mediapart suggère toutefois que les marins, à terre, ont pu continuer à se contaminer entre eux. Le site fait en effet état d'un marin ayant développé plusieurs symptômes compatibles avec le Covid-19, et qui avait, après son arrivée à Toulon, été placé en quatorzaine «avec des gens qui n'ont pas de symptômes, donc potentiellement non contaminés».

Contactée par Libé, Justine Brabant, auteure de l'enquête de Mediapart, assure être toujours en contact avec une dizaine de marins actuellement confinés. «Plusieurs d'entre eux m'ont assuré qu'ils avaient continué, en attendant le résultat de leurs tests, à être mélangés entre malades et non-malades.»

De son côté, le ministère des Armées assure : «Dès le départ et le temps que tous les marins puissent être testés, ceux présentant des symptômes compatibles avec le Covid-19 ont été séparés des marins ne présentant aucun symptôme, dans des lieux de confinement distincts.» R.A.