Manuela, 43 ans depuis quelques jours, a opté pour un confinement en bande. Tel un banc de poissons, dans l’Est parisien. Une aventure.
«On a décidé de se confiner avec les voisins. A trois familles. On habite dans le même immeuble, les enfants ont l’habitude de jouer ensemble. C’est apparu comme une évidence, je ne sais même pas dire qui a eu l’idée. En tout, on est douze. Deux enfants chacun entre 4 et 9 ans, deux couples… et mon ex et moi. Oui, c’est un peu bizarre dit comme ça, mais on a fait le choix qu’il revienne vivre à l’appartement le temps du confinement. C’était une drôle de décision, j’avoue. Sur le moment, ça nous a semblé être le mieux à faire : je ne me voyais pas seule pendant des semaines avec les enfants. Et puis comment allaient-ils voir leur père en respectant les règles du confinement alors qu’il vit chez des potes ?
«Nous voici donc sous le même toit depuis six semaines, il dort dans la chambre de notre fille. Un an après notre rupture, c’est étrange. Lui le conçoit, depuis le début, comme une chance, une sorte de parenthèse enchantée d’être réunis comme avant, avec les enfants. Prendre le temps, organiser des petits ateliers de cuisine et autres. Jusqu’ici, aucun de nous n’a travaillé, ça aide.
«Je ne dis pas que c’est tous les jours facile, surtout au début. Une ou deux fois, après des engueulades, il a failli repartir. Mais on a pris sur nous. Finalement, d’être ainsi à huis clos, tu finis aussi par te parler. Depuis la rupture, on était incapable d‘avoir une discussion, toujours en guerre. Cette situation exceptionnelle que l’on vit change la donne. Parce qu’on n’a pas le choix. On parle, on crève de vieux abcès. On avance vers une autre étape plus apaisée, j’espère.
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«Le fait d’être confiné en bande avec les voisins, ça aide aussi pas mal. Il y a un côté un peu fiesta. On garde les enfants à tour de rôle pour faire des activités ou des soirées pyjamas. Pour eux, c’est super, ils se créent des souvenirs communs. Et pour nous, c’est cool aussi. Ça permet de faire des petites pauses et la fête. Je crois que je n’ai jamais autant fait de soirées qu’en ce moment. On a fêté mon anniversaire le week-end dernier, ce que je ne fais absolument jamais. Petit barbecue électrique sur le balcon, trop bien.
«Se créent des liens nouveaux aussi entre nous, on se livre beaucoup plus les uns, les autres. On se raconte nos histoires, les problèmes de chacun. Avant de reprendre le travail la semaine dernière, je les ai consultés, je ne me voyais pas prendre la décision seule. Mais tous étaient ok, en fait, on est tous sur la même ligne : ce virus, on a presque envie de l’attraper pour en être débarrassés. C’est peut-être aussi pour cette raison que se confiner en bandes était si évident.»