Dans la «guerre» contre le Covid-19, les nationalistes corses ont décidé de mener leur propre bataille. A la tête de la collectivité depuis décembre 2015, le président de l'exécutif de Corse, Gilles Simeoni, a présenté jeudi son propre plan de déconfinement devant les élus de l'Assemblée. En visioconférence, le patron de la région a annoncé la couleur : la Corse doit pouvoir gérer sa sortie de confinement de façon autonome. Et pas seulement parce que c'est une île. Le 6 mai, l'épidémie y avait fait 67 morts et 6 personnes étaient toujours hospitalisées. Pour fonder ses décisions, le conseil exécutif a créé son propre conseil scientifique. Au programme : la réalisation de 3 500 tests par semaine, pour l'instant seulement dans des zones ciblées mais avec l'objectif, sans date, de pouvoir dépister l'intégralité de la population ; isoler les cas positifs à domicile ou dans des structures collectives ; distribuer des masques à tous les Corses, là aussi sans calendrier précis. Et surtout, conditionner l'accès au territoire Corse à la présentation d'un «green pass», c'est-à-dire un test Covid négatif à présenter. Une stratégie «innovante, révolutionnaire, même, à certains égards. Mais qui est la seule qui pourra nous permettre de trouver un équilibre entre exigence sanitaire et reprise de l'économie», assure Gilles Simeoni.
Reste notamment à négocier la faisabilité du passeport santé touristique avec l'Etat. Homme de consensus, Simeoni met habilement en avant la politique de «territorialisation du déconfinement» prônée par Edouard Philippe. Mais pour l'autre tête de la majorité, l'indépendantiste Jean-Guy Talamoni, il n'est «pas question d'être à la merci de décisions parisiennes que nous estimons mauvaises».
Le président de l'Assemblée de Corse a ainsi appelé les maires «à refuser d'ouvrir leurs établissements scolaires.» Adepte d'une autonomie mesurée, l'élu LREM Jean-Charles Orsucci, lui, fustige le «jacobinisme régional» des nationalistes : «J'ai le sentiment que pour eux, la bonne échelle de la décentralisation, c'est celle où ils ont le pouvoir.»