En Lozère, la solitude tue plus que le virus. Un seul mort du Covid-19, aucune hospitalisation en cours. Mais les maisons de retraite restent des lieux barricadés. Mémé Janine se désole : «Je ne peux plus aller faire chanter les copains et les copines les après-midi.» La voix est toute petite, toute douce, comme si elle avait peur que quelque chose se casse. La cheffe de chorale bénévole à Aumont-Aubrac, 86 ans, a fini par trouver la solution. Tous les jours, elle se précipite dès son réveil sur le téléphone. «Bonjour Radio Margeride ! C'est Mémé Janine !» Il est 9 heures. Les animatrices ne l'ont jamais rencontrée mais la connaissent bien : «Vous avez passé une bonne soirée ? A qui voulez-vous dédicacer un morceau aujourd'hui ?»
Chaque matin, Radio Margeride a les lignes qui saturent comme un Pôle Emploi. Un appel toutes les trois à cinq minutes. Le déconfinement n'a pas ralenti la cascade de bisous et les chansons tristes ou presque coquines qu'on se partage, les papis et mamies entre eux, les enfants coincés du côté de Montpellier, les petits-enfants qui n'ont pas encore repris l'école et pensent fort à la famille. Radio Margeride arrose un désert. Basée à Termes, dans le nord de la Lozère, elle émet aussi dans l'Aveyron, dans une partie du Cantal, de la Haute-Loire et de l'Ardèche. La plupart des chansons affirment que dans la région, on vit heureux. Ce lundi-là, les auditeurs ont droit à deux airs de Sylvie Pullès, «la Madonna de l'accordéo