La piscine de Paris 2024 va-t-elle ruisseler pour les habitants de la Seine-Saint-Denis ? Le département est l’un des plus pauvres de France pour s’exercer à la natation : on compte 0,55 bassin pour 10 000 habitants, quand la moyenne nationale est de 0,94. Dans le 93, un enfant sur deux ne sait pas faire la moindre brasse à l’entrée au collège. C’est dire l’ambition politique derrière le Centre aquatique olympique, choisi sur plan fin avril pour les Jeux olympiques et paralympiques de Paris, et qui sera construit sur la commune de Saint-Denis, relié au Stade de France par une passerelle au-dessus de l’autoroute. Le projet ne pouvait être réglé par les pouvoirs publics (174 millions d’euros au total) qu’à la condition de profiter aux citoyens, pas seulement aux meilleurs athlètes du monde.
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«Etre utile à la population, c'est effectivement un axe fort, souligne dans les colonnes du Parisien Patrick Ollier, président LR de la métropole du Grand Paris. Il est important que les enfants de Saint-Denis et de l'ensemble du département de Seine-Saint-Denis puissent apprendre à nager et puissent pratiquer la natation dans des conditions exceptionnelles.» La métropole a d'ailleurs choisi de verser 20 millions en plus des 154 initialement établis, pour des équipements qui n'ont rien à voir avec les JO. Espace aqualudique (bulles et toboggans), bassin d'apprentissage de 1,30 mètre de profondeur, skatepark, recyclerie sportive (où chacun pourra apporter du matériel à réparer), terrains de basket 3×3 et de foot à 5… «On a prévu des modalités de gestion avec Bouygues qui conduiront la métropole à verser 2,5 millions d'euros par an afin que les habitants puissent pratiquer la natation à des tarifs très intéressants», ajoute Ollier. Précision, en effet : ce joyau high-tech et écolo a été conçu selon un partenariat public-privé.
Cette méga-piscine était-elle vraiment une priorité pour les familles du département ? A combien s'élèvera le ticket d'entrée ? Les apprentis nageurs accepteront-ils de faire jusqu'à une heure ou une heure et demie de transport pour pénétrer dans ce temple du plongeon ? En privé, une figure de la gauche en Ile-de-France se montre dubitative. Loin de l'unanimisme transpartisan autour du projet : «La Seine-Saint-Denis n'a pas besoin d'un nouvel Aquaboulevard [complexe aqualudique situé dans le sud-ouest de Paris, à 33 euros l'accès pour les adultes et 19 pour les enfants, ndlr]. A priori, ce n'est pas adapté à des personnes modestes qui ont simplement envie de se rafraîchir, faire du sport ou apprendre à nager à leurs gamins. Il faut espérer qu'il ne s'agisse pas d'un caprice.»
Le Centre aquatique olympique ne sera pas l'unique équipement mis au service des habitants. En 2016, le conseil départemental, présidé par Stéphane Troussel (PS), a engagé un «plan piscine» de 40 millions d'euros, complété cet hiver par 15 millions du gouvernement, qui consiste à rénover les vieux bassins de la Seine-Saint-Denis.