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Libération
Récit

LR-LREM, accords et à cris

Les alliances du second tour des municipales avec des candidats du parti présidentiel crispent chez Les Républicains.
Gérard Collomb avec François-Noël Buffet, candidat Les Républicains pour la présidence de la Métropole de Lyon, le 28 mai, le jour de l'annonce de leur alliance. (Photo Bruno Amsellem pour Libération)
publié le 4 juin 2020 à 18h06

Le cas lyonnais n’était qu’un préambule. Le dépôt des listes pour le second tour des municipales a vu s’additionner les accords locaux entre candidats investis ou soutenus par Les Républicains d’une part, La République en marche d’autre part. Pour l’embarras du parti présidentiel, dont l’image en ressort un peu plus droitisée, mais aussi de LR : si la gêne y est restée plus discrète, on n’y redoute pas moins les effets nationaux de ces ententes.

Après l'accord lyonnais, LR se dépêchait de faire savoir, par un bref communiqué, que «cette décision répond à des spécificités territoriales et ne relève aucunement d'un accord politique au niveau national». De telles «spécificités» se sont, depuis, multipliées : elles concernent Bordeaux, Strasbourg, Clermont-Ferrand, Tours, Aurillac ou encore le Ve arrondissement de Paris - tandis qu'à Toulouse, le sortant LR Jean-Luc Moudenc a reçu dès le premier tour l'onction des deux mouvements.

Angle de tir. Dans la majorité des cas, la tête de liste revient à la droite, mais celle-ci embarquera derrière elle un certain nombre de candidats macronistes. Plusieurs de ces accords prévoient en outre que, la mairie revenant à l'un des partenaires, l'autre prenne la présidence de la métropole. Favorisant de premières prises de responsabilités locales de LREM, ces ententes ouvrent un bel angle de tir aux autres partis. La droite «fait tomber le masque et s'allie à Emmanuel Macron […]. Que faut-il de plus à leurs électeurs pour comprendre ?» a ricané Marine Le Pen sur Twitter, tandis que le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, se félicitait de cette «clarification» : «Il y a Les Républicains et Les Républicains en marche. Seul le rythme les distingue.»

A droite, «personne ne l'ouvre publiquement parce que le contexte ne s'y prête pas, mais en interne, ça gueule, rapporte une source parlementaire. Aux départementales [de mars prochain, ndlr], il faut présenter des binômes : pourra-t-on empêcher que se forment des couples LR-LREM ? Aux régionales, persuadera-t-on Xavier Bertrand [dans les Hauts-de-France] ou Valérie Pécresse [en Ile-de-France] de ne pas faire alliance, alors que nous l'avons fait dans les grandes villes ? Puis comment justifiera-t-on d'opposer un candidat à Macron, alors qu'on cogère dans plusieurs territoires ?»

«Boutiquiers». Dans une conférence de presse, mardi, le président de LR, Christian Jacob, a fait de son mieux pour relativiser ces accords. Estimant que, «sur les 5 000 maires qui restent à élire», ce genre d'ententes «se comptera sur les doigts d'une main, et encore, à peine», et qu'elles révéleraient avant tout la faiblesse de LREM. N'empêche : le patron du parti avait plusieurs fois déclaré, ces derniers mois, refuser les «accords de boutiquiers» : «La composition des listes municipales aura un impact direct sur les sénatoriales, insistait-il en août. Il n'est donc pas question de laisser se nouer des accords cachés avec LREM qui contribueraient à faire battre nos candidats aux sénatoriales.» La droite est actuellement majoritaire au Palais du Luxembourg.

Lors de ce scrutin municipal, il est vrai que le parti a souvent été placé devant le fait accompli par ses propres candidats, selon la logique propre aux élections locales. «Il y a un microclimat strasbourgeois : alors que PS et Verts s'entendent au niveau national, ils s'opposent ici, et inversement pour nos deux partis, justifie l'ex-tête de liste LR à Strasbourg, Jean-Philippe Vetter, dont la liste a fusionné avec celle du LREM Alain Fontanel. C'est vraiment une décision purement locale prise dans un contexte particulier.» Un argument auquel l'autoproclamé «parti des territoires» aura, plus que d'autres, du mal à s'opposer.