Ni quêtes ni cierges ni mariages ni enterrements ! Le confinement de la population pendant l’épidémie du Covid-19 a singulièrement ralenti les cérémonies religieuses. Et entamé les finances de l’Eglise catholique. Selon la Conférence des évêques de France (CEF), ce serait une cinquantaine de millions d’euros qui manqueraient dans les caisses des diocèses et des paroisses.
«Il manque des ressources très importantes, notamment dans les paroisses», a souligné, jeudi à Paris lors d'une conférence de presse, Ambroise Laurent, secrétaire général adjoint de la CEF, en charge des questions économiques. Pendant le confinement, les messes ont été suspendues. Et, il n'y a pas eu non plus de quêtes.
Celles-ci représentent habituellement 30% des ressources de l’Eglise. Selon la CEF, environ trois millions d’euros sont collectés chaque dimanche dans l’ensemble des paroisses françaises. Ce manque à gagner place, selon Ambroise Laurent, une dizaine de diocèses dans le rouge.
Vente de cierges
A Rennes, Régis Boccard, l'économe diocésain, n'est toutefois pas inquiet outre mesure. Car le diocèse est plutôt solide financièrement. Il n'empêche : la période de confinement a entraîné un trou dans les recettes d'environ 600 000 euros. Il n'y a pas eu que les quêtes à faire défaut. «Nous avons 120 000 euros de retard sur le denier de l'Eglise [le don volontaire des fidèles servant à la rémunération des prêtres, ndlr]», explique-t-il à Libération. Et même la vente de cierges a été affectée, une manne qui représente habituellement 600 000 euros de recettes annuelles pour le diocèse.
Dans le diocèse de Clermont-Ferrand, de taille moins importante que celui de Rennes, les pertes sont également significatives. «Pendant les deux mois de confinement, nous avons perdu les trois quarts de nos recettes», mentionne le père Bernard Lochet, vicaire général (l'adjoint de l'évêque). Et peu seront compensées. D'ailleurs, selon lui, les effets du confinement perdurent : «La plupart des mariages programmés en juin et en juillet ont été annulés.» Des moments où les assistances (plutôt nombreuses) sont généreuses.
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Pendant le confinement, la CEF et les diocèses ont mis en place des quêtes en ligne pour tenter de pallier la situation. Sur le site national, 45 000 personnes ont versé leur obole pour un don moyen de 40 euros. A Paris, les paroisses ont misé, elles aussi, sur Internet. «La situation est très contrastée de l'une à l'autre», explique à Libération Christophe Rousselot, directeur du développement des ressources financières du diocèse.
Financement participatif
A Paris, le succès des quêtes en ligne est corrélé à des curés au profil de geek, à la diffusion de messes sur Internet, ou à la mobilisation de quelques paroissiens motivés. Ce n’est pas forcément les paroisses les plus importantes qui ont réussi à récolter le plus d’argent pendant la crise sanitaire, selon le financier du diocèse de Paris.
Pour remédier à cette mauvaise passe, la CEF va lancer une campagne nationale d'appels aux dons du 13 au 28 juin dans la presse catholique. Une plateforme de financement participatif sera également ouverte. «Chaque donateur pourra orienter son don vers un diocèse ou une paroisse en particulier», indique-t-on au siège de l'épiscopat.
«Si notre campagne ne produit pas ses effets, cela mettra probablement les deux tiers des diocèses dans le rouge», estime Ambroise Laurent. Jusqu'à présent, en cas de difficultés financières, les dons et legs venaient souvent compenser. Mais, là aussi, ils se raréfient. C'est ce que constate le vicaire général de Clermont-Ferrand. «Nous ne sommes pas encore dans une situation difficile, explique Bernard Lonchet. Mais nous devons réfléchir à nos choix stratégiques.» En clair, le diocèse doit opérer des priorités dans ses actions.
A Paris, Christophe Rousselot estime, lui, que les pertes enregistrées pendant le confinement seront compensées. De fait, le diocèse de Paris compte encore 57 000 donateurs actifs. «Je pense que le sens des responsabilités des fidèles va jouer», explique-t-il. Sa crainte se situe plutôt sur le long terme. «Paris se vide de ses habitants, dit-il. Certains arrondissements perdent, chaque année, un à deux pour cent de leur population.»