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Libération

L’Etat prépare sa sortie graduelle de l’urgence sanitaire

Alors que le gouvernement s’apprête à mettre fin au régime créé en mars, il doit jongler entre la nécessaire prudence et les appels de plus en plus pressants à un retour à la normale.
A Paris, le 18 mars. (Cyril ZANNETTACCI/Photo Cyril Zannettacci. VU pour Libération)
publié le 10 juin 2020 à 20h31
(mis à jour le 11 juin 2020 à 10h10)

La France devrait mettre fin le 10 juillet à l'état d'urgence sanitaire. Selon le projet de loi présenté mercredi en Conseil des ministres, le gouvernement prévoit en effet de lever dans un mois ce régime d'exception instauré fin mars pour affronter la vague épidémique de coronavirus. «La situation sanitaire ne cesse de s'améliorer. Il n'est donc pas justifié de proroger cet état d'urgence sanitaire», a affirmé la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, à l'issue du Conseil des ministres. Mais une période transitoire devrait alors s'ouvrir, durant laquelle des mesures restrictives seront encore possibles.

Sur le plan sanitaire, la France voit-elle le bout du tunnel ?

«On peut dire qu'actuellement, raisonnablement, l'épidémie est contrôlée», a assuré vendredi le professeur Jean-François Delfraissy, président du conseil scientifique, en évoquant le septième avis de cette instance depuis le début de l'épidémie. Dans ce document, les experts font état de quatre scénarios postconfinement - dont le pire serait une reprise incontrôlable de la circulation du virus et dont le plus heureux reposerait sur une situation «stabilisée». Voilà des semaines que les chiffres poursuivent leur baisse. En début de semaine, selon la Direction générale de la santé, le pays était passé sous la barre des 1 000 malades du Covid-19 en réanimation et comptait 11 961 personnes hospitalisées (contre 14 028 une semaine plus tôt) avec 169 nouvelles admissions en 24 heures (contre 229 le 2 juin). «Laissons les choses s'ouvrir, les gens vivre, mais en respectant les mesures barrières», a même déclaré le chef de file du conseil scientifique dans le JDD.

En a-t-on vraiment fini avec l’état d’urgence sanitaire ?

S’appuyant sur les bons indicateurs qui dessinent un recul de la circulation du virus, le gouvernement a décidé de ne pas proroger l’état d’urgence sanitaire, comme il l’avait un temps envisagé. Créé par la loi du 23 mars, ce cadre juridique d’exception accordant au Premier ministre des pouvoirs très larges afin de faire face à l’épidémie avait été prorogé par le Parlement dans la loi votée le 9 mai. Mais le seuil de tolérance à l’égard des mesures de restriction des libertés publiques a baissé au fil du temps et avec l’accalmie sanitaire.

Le gouvernement n'acte pas pour autant dans la loi un complet retour à la normale. Le projet de loi présenté mercredi organise, non pas «une sortie sèche de l'état d'urgence sanitaire, mais plutôt une sortie en biseau», a expliqué Sibeth Ndiaye. Pour une période transitoire de quatre mois à compter du 10 juillet, le Premier ministre garde dans sa manche la possibilité de réglementer si besoin l'accès aux transports, l'ouverture d'établissements recevant du public, mais aussi de limiter les rassemblements sur la voie publique. Un point sensible au moment où se multiplient les manifestations contre le racisme et les violences policières. Plusieurs associations et syndicats demanderont d'ailleurs jeudi au Conseil d'Etat de trancher sur l'interdiction des rassemblements de plus de dix personnes. En cas de rebond épidémique, localisé ou général, qui nécessiterait de reprendre des mesures de confinement, le gouvernement devrait repasser par la case «état d'urgence sanitaire», via un décret en Conseil des ministres. Le texte doit être discuté à partir du 17 juin à l'Assemblée.

Qu’est-ce qui pourrait changer rapidement ?

Vendredi, Emmanuel Macron reçoit le conseil scientifique à l'Elysée avant de présider un nouveau Conseil de défense et de s'adresser, dimanche, aux Français. La pression s'exerce à tous les niveaux : écoles, entreprises, commerces, transports… Le ministre de l'Education évoque un «assouplissement possible» du protocole sanitaire, sans plus de précision. Mardi, le secrétaire d'Etat chargé du Tourisme, Jean-Baptiste Lemoyne, a expliqué que «le recul progressif du virus, devrait permettre […] d'avancer de quelques jours la réouverture des restaurants dans leur ensemble» en Ile-de-France, l'une des trois zones orange avec la Guyane et Mayotte.