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Libération
Éditorial

Rattrapage

publié le 11 juin 2020 à 20h16

Il arrive que la liberté ait de mauvaises conséquences et que ce soit l’obligation qui libère. C’est ce qui vient d’arriver à l’école de la République en ces temps de confinement, puis de déconfinement progressif. En théorie, pas trop de problèmes : l’obligation scolaire n’est pas celle de la présence à l’école ; en temps normal, certaines familles peuvent si elles le désirent, si elles en ont les moyens, assurer elles-mêmes l’instruction de leurs enfants. L’école à la maison est une belle chose si l’on a des précepteurs, ou si les parents ont le temps et les compétences pour suppléer les professeurs. Quant à l’éducation à distance, massivement pratiquée grâce au dévouement de la grande majorité des professeurs, elle est possible dans les foyers spacieux où les parents servent de tuteurs à côté des enseignants qui apparaissent sur des écrans.

Mais hors de ces conditions particulières, l'instruction à domicile débouche souvent sur un désastre. Pendant et après le confinement, le nombre d'élèves «décrocheurs» a explosé. Et surtout, la grande inégalité des conditions de vie a débouché sur une inégalité extrême de l'enseignement, quel que soit l'engagement des professeurs. On a dit que la réouverture des écoles était commandée par des impératifs économiques. Critique à courte vue. La fréquentation de l'école a un but en soi, dispenser un enseignement à tous les enfants, quelle que soit leur origine sociale. Il faut maintenant, pour les plus défavorisés, rattraper le temps perdu. Tâche difficile, herculéenne parfois. Pour rendre compte de cet impératif nouveau, Libération, tout en analysant le problème, a voulu contribuer à sa solution. Prescriptions des spécialistes, exemples et initiatives : voici un «rattrapage, mode d'emploi». On se souvient de la phrase de Victor Hugo : «Ouvrir une école, c'est fermer une prison.» Rouvrir les écoles, c'est fermer la prison du confinement et pallier ses effets délétères.