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Libération
La clé sous la porte (5/6)

Linguali, la start-up stoppée net par le Covid-19

(Illustration Christelle Causse)
par Emilie Laystary
publié le 19 juin 2020 à 11h52

Toute la semaine, récit d'histoires de PME qui ont mis la clé sous la porte ou se trouvent en redressement judiciaire après la crise sanitaire du Covid-19. Ce vendredi, une start-up liquidée en plein envol.

«On était sur le point de devenir viable, mais en quatre jours on a vu tous nos événements de l'année s'annuler», raconte James Anderson. Créée en 2014, la start-up Linguali, située à Bordeaux et spécialisée dans l'interprétariat, venait de doubler son chiffre d'affaires en 2019 et comptait en faire autant en 2020. «Mais le Covid-19 est arrivé alors qu'on était en train de boucler une levée de fonds.» Le 1er avril, la start-up est liquidée et quatre salariés perdent leur emploi.

L'aventure Linguali avait pourtant bien commencé. Il y a six ans, l'interprète de conférence se fait la réflexion que pour assurer la traduction d'événements (congrès, séminaires, etc.), le dispositif de casques proposé au public est désuet. «On traversait tout Paris avec ce matériel lourd, dans des valises pas possibles, parfois pour seulement vingt personnes. C'était absurde.» James Anderson se rapproche alors du consultant en services numériques François-Xavier Bodin, qui devient son associé. C'est ainsi que naît Linguali, une appli permettant d'écouter une traduction en simultané via les téléphones mobiles des participants. «L'idée était de casser le prix de l'équipement, pas le métier des interprètes», souligne James Anderson.

Le service remporte les faveurs du secteur de l'événementiel, qui y voit un moyen de baisser ses coûts d'organisation. Après avoir gagné plusieurs prix de technologie, Linguali se fait progressivement une place. En se rapprochant d'un fonds d'investissement, Linguali envisage 2020 comme une année charnière. Mais lorsque celui-ci se désengage, la start-up comprend que la fin est proche. «Le concours de circonstances a été catastrophique. On aurait pu survivre aux annulations, mais avec la levée de fonds qui n'a pas eu lieu, nos espoirs se sont envolés. On était déjà à terre quand on s'est pris une balle dans la tête…», résume James Anderson.

Acculés, les deux associés envisagent de mettre la boîte en pause en attendant la reprise mais un tel scénario aurait mis Linguali en état de cessation de paiements. «De toute façon, notre mort subite est arrivée si vite qu'à ce moment-là, le dispositif de prêts garantis par l'Etat n'était pas encore déployé», fait remarquer l'ancien dirigeant. Depuis, James Anderson a retrouvé un emploil auprès d'un ancien concurrent. «Mais voir cinq années de travail passionné partir en fumée, c'est profondément triste», conclut-il.