Un léger décalage… Au niveau national, Emmanuel Macron, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon, chacun ou chacune dans son couloir, dominent le théâtre politique. Mais dans les villes et les villages, on assiste à un tout autre spectacle. Dans la plupart des endroits stratégiques, Marseille, Lyon, Nantes, Rennes, Rouen, Toulouse, Bordeaux, Paris, c'est un duel droite-gauche qui décidera du pouvoir municipal. La France insoumise est discrète, le Rassemblement national peine à conquérir des mairies, la République en marche est au balcon du «en même temps», minoritaire, ou bien contrainte de s'allier avec la droite pour faire bonne figure. LR mise sur ses sortants pour sortir gagnants de l'épreuve ; la gauche, en bonne forme municipale, oscille entre vague verte et résistance rose pour garder ou conquérir des bastions. Concentré sur la haute politique et sur la définition du «monde d'après», abîmé dans une réflexion sur ce qu'il peut faire pendant les deux années restantes du quinquennat, Emmanuel Macron feint de négliger ce scrutin local qu'il isole des enjeux nationaux pour se rassurer. Tel le renard de La Fontaine, faute de pouvoir atteindre les raisins convoités, il leur tourne le dos en grommelant. «Ils sont trop verts, dit-il, et bons pour les goujats.» Comme on le susurre parfois à l'Elysée : «Rien d'étonnant dans cette piètre performance locale, nous avons hérité de tous les candidats dont les autres partis ne voulaient pas.» Ce qui n'est guère aimable pour les marcheurs en compétition, mais démontre aussi une certaine lucidité. Le parti présidentiel fut redoutable dans la conquête de l'Elysée. Il a manqué son implantation dans le pays profond, qui reste attaché aux anciens clivages. Droite et gauche peuvent ainsi rêver d'un retour en force. Mais on sait aussi que c'est une autre paire de manches.
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