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Elections

Le PS divisé sur la question de l’union

Au lendemain du second tour des municipales, si certains socialistes se félicitent de la stratégie d’alliances du parti, d’autres préfèrent souligner les victoires en solo, comme à Lille et à Dijon, refusant de s’effacer en vue des prochains scrutins.
Lors du lancement de la campagne du PS pour les municipales, le 1er février. (Photo Denis Allard)
publié le 29 juin 2020 à 19h51

Les résultats électoraux se lisent souvent différemment, y compris au sein de la même famille politique. Au lendemain du second tour des municipales, Olivier Faure, le patron des socialistes, a célébré sa stratégie d'alliances, scellées par endroits au détriment de son camp, pour laisser un écolo prendre la tête de l'union. Un pari qu'il s'imagine renouveler lors des prochaines échéances électorales : les régionales, les départementales et, pourquoi pas, la présidentielle. «Je suis prêt à me ranger derrière celui qui incarnera le bloc social-écologiste», a déclaré le premier secrétaire pendant la soirée électorale.

Mais certains socialistes ne l'entendent pas ainsi. Pour eux, dimanche a sonné non pas l'avènement de la social-écologie mais le retour de la gauche, et ils revendiquent leur place dans cette combinaison gagnante : ils l'emportent avec les Verts certes, mais les Verts l'emportent aussi avec eux. Paris, Nantes, Rennes, Montpellier, Saint-Denis, Quimper… Exemples à l'appui, ils rappellent qu'ils étaient souvent à la tête des alliances victorieuses, même si celles tirées par les écolos les ont un peu éclipsés. «C'est plus voyant car ils partaient de moins haut», reconnaît Patrick Kanner. Le président du groupe PS au Sénat ne «claironne pas» mais rappelle quand même que ses coreligionnaires ont conservé ou conquis de nombreuses villes, parfois contre les écolos, comme à Lille ou à Dijon.

En retrait

Pour Chloé Morin, directrice du département Opinion de la Fondation Jean-Jaurès, les victoires écolos ne sont «pas une vague mais l'arbre qui cache la forêt. La vérité, c'est que les victoires EE-LV ne sont pas possibles sans union de la gauche». Kanner va un cran plus loin : «Ce qui ressort des municipales, c'est que la deuxième force politique du pays, c'est le PS, la première force de gauche, c'est le PS. Il faut que tout le monde l'intègre.» Y compris les écolos et leurs représentants : «Quand j'entends Yannick Jadot, je dis : "Pas de triomphalisme. " Une victoire c'est une chose, durer en est une autre.»

Depuis qu'il a pris la tête du PS il y a deux ans, Olivier Faure prône le rassemblement de la gauche, quitte à se mettre en retrait après une présidentielle 2017 où les écolos s'étaient rangés derrière la candidature de Benoît Hamon. Pour beaucoup de socialistes, les municipales confortent la ligne Faure. Mais certains récalcitrants opposent à la stratégie du «dépassement» la menace de «l'effacement». «Je ne suis pas d'accord avec Olivier Faure : je suis pour un candidat socialiste à la présidentielle», affirme le sénateur Rachid Temal. «L'union oui, mais une union équilibrée», avertit aussi Kanner. Autrement dit, avec des écolos qui pèsent un peu moins dans la balance.

Question d’habitude

Certains osent aller plus loin et revendiquent encore d'être le centre de gravité de l'opposition. Pas évident, quand on a longtemps été la première force d'opposition et l'incarnation de la «gauche de gouvernement», alors que les écolos étaient une force d'appoint, d'inverser la logique. Question d'habitude, mais aussi de convictions : de Stéphane Le Foll à François Rebsamen, on n'est pas convaincu de la nécessité de changer de paradigme. Ils grimacent quand ils entendent les écolos parler de la vieille gauche productiviste et d'une social-démocratie obsolète. Même s'ils reconnaissent que les thématiques des alliés verts dominent, ils répètent que la question sociale est essentielle, comme si les Verts la négligeaient, et qu'EE-LV n'a pas le monopole de l'écologie. Dimanche soir, Martine Aubry a ainsi promis de faire la transition écologique «au galop». «Le socialisme sait intégrer de nouveaux combats, assure Rachid Temal. L'écologie ne remet pas tout en question. Si je pensais que c'était une vision globale, je serais écolo».