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Justice

Esclavage moderne en Champagne : «Même les passeurs nous traitaient mieux»

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Un procès a levé le voile la semaine dernière à Reims sur les conditions de travail de vendangeurs sans papiers exploités par des sous-traitants des grandes maisons de champagne. Ces dernières, qui en bénéficient, n’étaient pas poursuivies.
Des parcelles de vignes dans le département de la Marne. (Photo Guillaume Binet. Myop)
publié le 6 juillet 2020 à 19h26

C'est un procès qui secoue le petit monde du champagne. Plusieurs sociétés sont accusées d'avoir participé à un vaste réseau de travail illégal pour assurer les vendanges, fin août 2018. Avec, au cœur, une centaine de sans-papiers, principalement originaires d'Afghanistan et d'Afrique, exploités dans des conditions indignes, proches de «l'esclavage» selon leurs témoignages. Les gérants étaient entendus par les juges au tribunal judiciaire de Reims en fin de semaine dernière.

La plupart des sans-papiers ont obtenu l’info par le biais d’une connaissance à la fin de l’été 2018 : une dame recherche des travailleurs pour récolter le raisin dans les vignes de Champagne. A la clé, une rémunération de 10 euros par heure, un logement dans une chambre d’hôtel et de la nourriture. En contrepartie, ils doivent s’acquitter du versement de 25 euros par jour. Surtout, tous se voient promettre un contrat de travail, précieux pour accéder à une amélioration de leur condition en France. Le plus souvent, le rendez-vous est fixé près de la gare de l’Est, dans un parc, où un contact les envoie en direction du Bourget. Là-bas, une camionnette les attend et fonce à toute berzingue vers l’Est, avec parfois plus de onze d’entre eux entassés à bord. Parfois, les sans-papiers sont aussi recrutés par les chefs d’équipe près de la Porte de la Chapelle ou directement dans les camps de migrants et les centres d’accueil de demandeurs d’asile. En 2018, Ibrahim, Ahmed et Mustafa (1), trois sans-papie