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Libération
Chronique «Bac, première»

Réforme du lycée : «C’était une année de première très étrange»

Trois élèves de première ont raconté tous les mois à «Libération» comment ils vivaient la réforme du lycée. Inès, Camille et Maxence font le bilan d'une année mouvementée.
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publié le 8 juillet 2020 à 14h51

Après la chronique «Bulletin des secondes» l'an dernier, Libération a suivi cette année trois élèves désormais en classe de première. Cobayes de la réforme du lycée à la sauce Jean-Michel Blanquer, ils nous ont raconté chaque mois – chacun à leur tour – cette réforme du lycée entre inquiétudes, bonnes et mauvaises surprises. En cette fin d'année scolaire, Inès, Camille et Maxence font le bilan de cette année mouvementée marquée également par la crise sanitaire.

Inès, lycée Albert-Camus à Nîmes : «L’année s’est relativement bien passée»

«Au début de l'année, ça a été un petit choc, cette nouvelle réforme a quand même pas mal bouleversé mon quotidien. C'était la première fois que je me disais que ça changeait vraiment du niveau précédent. L'absence de groupe classe est ce qui m'a le plus perturbée. Même si je me suis habituée au fil de l'année, je ne trouve pas ça bénéfique. Pendant la période du confinement, ça n'a d'ailleurs pas été pratique. Pour chaque spécialité, si on n'avait pas compris quelque chose, on devait demander à une personne différente. Globalement, l'année s'est relativement bien passée. Malgré les nouvelles complications dues au coronavirus, on a finalement réussi à s'adapter.

«J’ai beaucoup appris cette année même si ce n’était pas dans les conditions habituelles. Les programmes des nouvelles spécialités étaient bien. En SES par exemple, c’était beaucoup plus approfondi que l’an dernier. Je me suis rendu compte que c’était vraiment une matière qui me plaisait beaucoup, voire ma matière préférée. Le programme de ma spécialité histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques était aussi très intéressant.

«La terminale risque toutefois d'être rude car dès septembre on va certainement devoir travailler beaucoup. On va nous dire que l'an dernier, on n'a pas travaillé toute l'année alors qu'on a quand même pas mal bossé, bien qu'à un rythme plus lent puisque l'on était chez nous. Ce sera aussi la première fois que l'on passera de vraies épreuves étant donné que l'on n'a pas eu le bac de français. Les «E3C» [épreuves communes de contrôle continu, ndlr] sont quand même une étape moins importante que le bac. Il y a plus d'appréhension. Et puis, même si je suis retournée une semaine et demie au lycée, il faudra aussi se réhabituer à revenir en cours tous les jours pendant une longue période.»

Maxence, lycée Le-Garros à Auch : «Une année de première très étrange»

«L'année se termine bizarrement. Je ne porte pas grand intérêt aux résultats du bac, que je n'ai pas encore eus, puisque l'on n'a pas passé d'épreuves. Il n'y a aucun suspense. C'était une année de première très étrange dans son ensemble. J'ai appris beaucoup de choses mais c'est dommage de ne pas avoir passé d'épreuves car je pensais ainsi m'entraîner à être en conditions d'examen. Mais c'est original ! Comme point positif de cette année, je retiens le confinement. J'ai apprécié d'être à la maison et d'apprendre à étudier autrement. J'ai aimé aussi que les enseignements de spécialités soient plus orientés et que l'on puisse faire des choix variés. Sinon, j'aurais eu du mal à choisir dans quelle filière m'orienter.

«Le stress, présent durant tous les événements survenus cette année, est le point le plus négatif. Une inquiétude aussi alimentée par l'incertitude : il y a plein de choses qu'on ne savait pas ou dont on n'avait pas les détails, qui sont arrivées comme un cheveu sur la soupe. Les E3C étaient assez angoissantes, bizarrement préparées. On était dans des conditions d'examen sans avoir l'impression d'en passer un contrairement au brevet. Tout le monde était perdu. Le fait d'avoir un programme extrêmement chargé, obligeant les profs à se dépêcher de terminer les leçons, n'était également pas agréable. Si on loupait une journée, on était perdu.

«J’ai du mal à appréhender la terminale car les scientifiques prévoient déjà une seconde vague de coronavirus. Je ne sais pas comment va se passer la rentrée, si on aura des masques, si on sera reconfiné ou non. L’année de terminale risque d’être à nouveau très étrange.»

Camille, lycée Henri-IV à Paris : «L’année a été catastrophique»

«Je n'ai pas du tout l'impression d'avoir passé une année de bac. Je porte d'ailleurs moins d'intérêt aux résultats. On a eu nos bulletins, on attend de connaître l'harmonisation mais globalement on sait ce qu'on a fait ou pas. Le bilan de cette année de première est que c'était le bazar. Malgré toute la contestation qu'il y a eue notamment autour des E3C, l'éducation nationale a quand même voulu maintenir une réforme qui ne marchait pas. Ça a mis tout le monde dans la galère, les terminales, nous les premières. L'année a été catastrophique. Malgré le Covid-19, elle aurait pu mieux se dérouler si le ministère avait écouté les profs et les élèves. C'est le gros point négatif de cette année.

«C'est dommage car j'ai apprécié les nouvelles spécialités proposées comme histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques. C'est un plus de la réforme de pouvoir choisir les matières que l'on veut et de ne pas être bloqué dans une filière avec des matières qui ne nous correspondent pas. Le fait de pouvoir abandonner une spécialité en fin de première est aussi une bonne chose. J'avais pris maths et je suis contente de ne pas rester avec ce poids en terminale. Ces points positifs ont malheureusement été envahis par tout le négatif.

«Pour la terminale, je pense qu’il va falloir revoir les programmes car ceux de première n’ont pas été faits comme ils auraient dû l’être. Cette nouvelle année va certainement être bien différente en raison de la crise sanitaire. En outre, avec la réforme on ne sait pas comment les choses vont se dérouler pour les études supérieures. La terminale va être une année encore plus stressante que la première avec la pression autour de Parcoursup et du bac. Je l’appréhende vraiment.»