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Bretagne

Dans le Finistère, un projet d'extension de porcherie fait grouiner

L'élevage porcin de Plougonvelin devrait agrandir ses capacités d'accueil, faisant craindre des conséquences néfastes sur l'environnement. Une concertation publique sur le sujet s'achèvera le 19 juillet.
(JEAN-FRANCOIS MONIER/Photo Jeans-François Monier. AFP)
publié le 17 juillet 2020 à 11h54

L’extension d’un élevage porcin à Plougonvelin, petite station balnéaire et agricole du Nord Finistère, aux côtes découpées et hérissées de pointes rocheuses, baignant dans les eaux claires de la mer d’Iroise, aura-t-elle un impact sur son environnement ? La question agite depuis quelques semaines la population locale. Une question récurrente en Bretagne, région particulièrement touchée par les effets néfastes des élevages intensifs sur la qualité des eaux – à l’origine, entre autres, du phénomène des algues vertes.

«Difficile de se faire une idée précise du projet»

A Plougonvelin, il n'est pas question toutefois d'une méga-concentration industrielle telle que l'on peut en observer ailleurs dans la région. Le projet est même plutôt à ranger parmi les plus modestes. Soit quelque 150 truies pour une production d'environ 4 000 porcs charcutiers par an. On est loin de la moyenne régionale qui se situe plutôt autour de 200 truies et peut atteindre les 500 à 600 animaux reproducteurs regroupés dans un même élevage, avec une production de porcs annuelle à l'avenant. Reste qu'il est situé au cœur d'un secteur particulièrement sensible – le Parc marin d'Iroise, zone Natura 2000, zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique – et soulève à nouveau les insuffisances d'une réglementation qui n'a cessé de s'assouplir ces dernières années pour exonérer la plupart des projets d'extension ou de création d'élevages de toute enquête publique et de toute étude d'impact environnementale digne de ce nom. Celles-ci ne conditionnant, depuis 2014 et sauf exception, les autorisations de nouveaux élevages qu'à partir du seuil de 750 truies ou de 2 000 emplacements pour les porcs charcutiers (l'extension de Plougonvelin en prévoit 600). En deçà, une simple procédure «d'enregistrement» suffit. Ce que dénoncent sans relâche les associations environnementales.

«Nous ne nous prononçons pas sur la validité ou non du projet, souligne Philippe Ris, qui s'est présenté aux dernières municipales de Plougonvelin en agitant le dossier d'extension. Ce que nous voulons, c'est qu'il soit requalifié, compte tenu de sa situation et comme cela se fait dans certains cas, pour être soumis à une étude d'impact et pas seulement à une simple procédure d'enregistrement après une consultation publique où il est très difficile de se faire une idée précise du projet.» Pour appuyer sa requête, ce chef d'entreprise pointe également les «anomalies» du dossier, consultable sur le site de la préfecture du Finistère. Celui-ci indique en effet une distance du futur élevage à 2 kilomètres de littoral quand il ne serait, selon les calculs de Ris, qu'à 1,6 kilomètre. Surtout, ce document officiel (Cerfa) aurait été modifié, rendant caduque l'indication de proximité ou non avec un site Natura 2000.

«C’est un dossier qui améliore les choses»

L'élu municipal s'interroge enfin sur la triple casquette d'un des porteurs du projet, Bernard Gouerec, promoteur du projet qui a été réélu maire de la commune tout en étant aussi vice-président chargé de l'eau et de l'assainissement de la communauté de communes du pays d'Iroise. Juge et partie ? C'est l'avis de Véronique Le Ru, membre du collectif Sous l'épandage la plage qui compte une centaine de membres et a lancé une pétition contre le projet. Pour éviter tout risque de «ruissellement» des rejets azotés vers la mer, l'étang de Kerjean ou la ria du Conquet, en aval de certaines parcelles, elle aussi réclame une étude d'impact. Face à cette bronca, le maire de Plougonvelin et promoteur du projet avec son fils Thomas reste serein, faisant notamment remarquer que la pression de l'azote issu des déjections animales sur les terres environnantes, déjà cultivées par deux autres éleveurs mais destinées à rejoindre l'exploitation pour lui offrir autant de surfaces d'épandage supplémentaires, sera moins forte qu'aujourd'hui.

Bernard Gouerec fait également remarquer que l'extension se propose de produire du porc Label rouge, avec 1,20 mètre carré minimum d'espace par animal, ceux-ci étant élevés sur paille, ce qui favorise l'assimilation des déjections par les sols. S'il reconnaît la proximité d'une zone Natura 2000 avec une des parcelles du projet d'extension, où se pratiquent déjà des épandages, il rappelle que celle-ci reste protégée de talus conséquents. Bref autant de gages qui devraient selon lui rassurer quant aux risques d'éventuels problèmes environnementaux. «C'est un dossier qui améliore les choses», assure-t-il. Peut-être. Ses arguments seraient cependant plus convaincants s'ils pouvaient être vérifiés par une instance indépendante. En attendant, il reste encore quelques heures pour donner son avis en envoyant un courriel à la préfecture, la consultation publique étant prévue jusqu'au 19 juillet.