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Récit

Cathédrale de Nantes : après l'incendie, l'émotion et les ministres

L’incendie touchant la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Nantes samedi a détruit le grand orgue. La piste de l’acte volontaire est privilégiée. Jean Castex s'est rendu sur place
Jean Castex devant la cathédrale de Nantes, samedi. (Photo Franck Tomps pour Libération)
publié le 18 juillet 2020 à 15h15
(mis à jour le 18 juillet 2020 à 19h17)

Un peu plus d’un an après l’incendie qui a ravagé Notre-Dame de Paris, c’est la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Nantes qui est victime des flammes. Vers 8 heures du matin, ce samedi, des passants donnent l’alerte. Une centaine de pompiers sont mobilisés et le feu est maîtrisé près de deux heures plus tard.

Cet incendie est le deuxième que connaît l'édifice en moins de cinquante ans. En 1972, déjà, la toiture avait été totalement ravagée par un incendie déclenché par un ouvrier lors d'un chantier. Aujourd'hui, les passants s'arrêtent pour contempler les dégâts, séparés du bâtiment par la rubalise qui bloque l'accès à la place Saint-Pierre. Des traînées de suie remontent la façade depuis la rosace centrale. William fait part de sa tristesse. Il a vu l'incendie ce matin et est revenu avec sa femme une fois celui-ci éteint : «Cela faisait comme une cheminée avec un brasier, c'était très impressionnant. Pour nous, c'est avant tout un monument du patrimoine historique nantais. Il y a bien des messes, comme à Noël, mais c'est surtout un lieu où l'on vient jeter un œil régulièrement. Ça fait mal de savoir qu'il sera peut-être fermé pendant longtemps.»

A l'intérieur de la cathédrale, le grand orgue est totalement détruit, des œuvres seraient aussi touchées. Sur place en fin de matinée, Johanna Rolland, maire de Nantes, a constaté les dégâts. «J'ai pu entrer avec toutes les mesures de sécurités dans la cathédrale et je dois préciser que nous ne sommes pas dans la même situation qu'en 1972. Aujourd'hui il y a des dommages, mais localisés, précise-t-elle. La cathédrale perd un tableau de Flandrin d'une grande valeur et le grand orgue, mais l'incendie est de moins grande ampleur; il est moindre également que celui qui a détruit Notre Dame de Paris l'an dernier. Je le redis car il faut prendre la mesure des choses, même si cela n'enlève rien à notre tristesse.»

L'émotion des habitants tient évidemment à la représentation patrimoniale et religieuse de la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Nantes. Elle est aussi liée au symbole attaché à cet édifice dont la construction a débuté au XVe siècle, et qui a résisté aux bombardements américains de 1943 alors qu'une grande partie du centre-ville était détruit. Le souvenir de 1972 est aussi dans bien des esprits, comme pour Maryse Boudelier qui a grandi dans le quartier et se remémore l'événement : «J'étais à l'école et quand nous sommes rentrés, nous avons été réunis avec tous les habitants du quartier sur le cours Saint-Pierre (derrière la cathédrale, ndlr). C'était très impressionnant. Aujourd'hui, ce nouvel incendie nous refait mal au cœur. C'est une mémoire, une histoire et le savoir-faire de tous les compagnons qui ont travaillé dessus qui part en fumée.»

Castex :  «L’État prendra toute sa part»

En milieu d’après-midi, les abords de la cathédrale sont vidés des passants. Le Premier ministre Jean Castex, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et la ministre de la Culture Roselyne Bachelot sont attendus. Seuls les journalistes accrédités auprès de la préfecture de Loire-Atlantique sont autorisés à rester en lisière de la place. Deux journalistes sont refoulées par les forces de l’ordre. Elles font valoir leur carte de presse, en vain. Pour ceux qui restent, suivent deux heures d’une longue attente avant l’arrivée de la délégation ministérielle. Lorsqu’ils sont enfin sur place vers 16 heures, les légères volutes de fumée qui s’échappaient encore de la rosace en début d’après-midi ont disparu. La visite de la cathédrale par les trois ministres, accompagnés de Johanna Rolland, débute. La vague d’émotion entretenue par la présence de badauds est retombée. Le parvis se transforme en un plateau taillé pour une opération de communication.

A la sortie de la cathédrale, seul Jean Castex prend la parole. Après avoir manifesté la solidarité de la nation à l'endroit des Nantaises et des Nantais, et des catholiques, et salué la mobilisation des sapeurs pompiers, il assure souhaiter une remise en l'état de la cathédrale «le plus rapidement possible. L'Etat prendra toute sa part», assure-t-il sans évoquer l'enquête.

A 18 heures, la communauté catholique s'était donné rendez-vous à la basilique Saint-Nicolas, également en centre-ville. La messe rassemble une centaine de fidèles.

Cet incendie est le deuxième à toucher une cathédrale dans l’ouest de la France, en quelques semaines. A Rennes, dans la nuit du 11 au 12 juin, le feu avait pris devant l’une des portes de la cathédrale. Il serait d’origine criminelle ; une piste également envisagée ce samedi à Nantes. Trois départs de feu - au niveau du grand orge et à droite et à gauche de la nef - ont été constatés et une enquête a été ouverte par le Parquet. En fin de journée, le procureur Pierre Sennès annonce qu’aucune trace d’effraction n’a été constatée.

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