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A Tours, les maires roses-verts atteignent l’âge de réseau

Une vingtaine d’édiles PS et EE-LV ont fait le déplacement mardi pour parler transition écologique et «contre-pouvoirs». Mais pas (encore) de la présidentielle.
Les maires Jeanne Barseghian (Strasbourg), Eric Piolle (Grenoble), Emmanuel Denis (Tours) et Anne Hidalgo (Paris), mardi à Tours. (Photo Albert Facelly pour Libération)
publié le 21 juillet 2020 à 20h21

On a toujours le temps de prendre une belle photo de famille. On se sent moins seul une fois rentré chez soi, moins d’un mois après le second tour des municipales. Sans compter qu’il n’est pas interdit de partager les bonnes idées ou les mauvaises expériences. Tel était le programme de la vingtaine de maires écolos et socialistes réunis mardi à Tours pour une journée de travail consacrée à la transition écologique qui devrait déboucher à l’automne sur un réseau de villes roses-vertes.

L'hôte s'appelle Emmanuel Denis. Et le nouvel édile tourangeau (EE-LV) a mis les petits plats dans les grands pour l'occasion. Venu accueillir ses homologues à la gare, il les a escortés jusqu'à l'hôtel de ville, où un temps de travail entre élus était prévu avant de prendre la pose pour les photographes et de déjeuner dans une guinguette sur les bords de la Loire. Pourquoi Tours ? «J'ai été élu sur une large union de la gauche et géographiquement, nous avons une position centrale», répond l'élu. Surtout, Tours n'est ni Paris ni Grenoble.

Car les vrais artisans de la journée s'appellent Anne Hidalgo et Eric Piolle. Le réseau de villes roses-vertes, c'est leur idée. Mais loin d'eux celle de regarder du côté de la prochaine présidentielle… «Je ne suis pas candidate en 2022», a répété la maire de Paris. Façon de répondre sans le nommer au président de Lyon Métropole, Bruno Bernard, qui a lui aussi fait le déplacement à Tours mardi, contrairement au nouveau maire écolo de Lyon, Grégory Doucet. Bernard a en effet pris soin d'écarter dès dimanche toute idée d'un soutien écolo à une éventuelle candidature d'Anne Hidalgo…

«Contrepoids»

L'objectif de ce réseau ? «S'épauler» entre élus, pour mieux résister au «bashing de la presse et des lobbys», notamment sur les «mobilités». Le rôle de la maire de Paris ? Peaufiner l'alliage entre écolos et sociaux-démocrates, dont elle était d'ailleurs loin d'être la seule représentante mardi. Nathalie Appéré (Rennes), Johanna Rolland (Nantes) ou le nouveau maire PS de Nancy, Mathieu Klein, tous socialistes comme elle, sont de la partie. Sans parler de présidentielle, Anne Hidalgo a bien dans l'idée de jouer un rôle sur la scène nationale : «Notre réseau a vocation à être un contrepoids et un contre-pouvoir au gouvernement.»

Une ligne partagée par le maire de Grenoble. A ceci près qu'Eric Piolle ajoute un objectif à la journée de mardi : «Clarifier les pratiques politiques.» Comprendre : si tous les maires socialistes n'ont pas été invités, c'est qu'il y a une bonne raison. «On a vu que le PS est encore capable de faire des fronts anti-écolos», rappelle-t-il, amer. La semaine dernière, son candidat à la présidence de la métropole grenobloise a été battu par le président sortant ex-socialiste et ancien allié de la majorité écolo grâce aux voix de la droite et de LREM, privant le maire de Grenoble d'un important levier d'action. Même méfiance du côté de l'une des participantes, qui avoue regretter un peu le temps des boucles WhatsApp monochromes - vert - lancées par Piolle l'été dernier, avec toutes les têtes de listes EE-LV. «Mais je prends ici ce qu'il y a à prendre et on verra ce que ça donnera», ajoute-t-elle.

Tensions

Malgré quelques regards en chiens de faïence échangés entre certains verts et d’autres roses (comme les deux adjointes de Martine Aubry venues de Lille, où PS et EE-LV étaient opposés fin juin), l’ambiance de la journée se veut studieuse - il sera question de 5G, de pesticides, de pollution, de financement des transports en commun - mais décontractée. Le climatologue Jean Jouzel ainsi que l’économiste Laurence Tubiana, cheville ouvrière de la COP 21, participent aux échanges. Mais si tensions il y a eu, elles se sont réglées à huis clos puisque ni la séance de travail ni le déjeuner à la guinguette n’étaient ouverts à la presse.

Dans le hall de la mairie, certains élus se voient pour la première fois, comme Jeanne Barseghian (Strasbourg) et Pierre Hurmic (Bordeaux). Les cabinets échangent les numéros de téléphone. «Ça fait du bien de voir des visages derrière la boucle WhatsApp», se réjouit Hurmic. Pour lui comme pour sa nouvelle amie strasbourgeoise, l'objectif de cette journée est clair. «Nous sommes ici pour échanger sur notre expérience et peser pour faire entendre la voix des territoires», prévient Barseghian, se réappropriant un mot et un concept repris à toutes les sauces par le nouveau Premier ministre. Et poser les premiers jalons d'une alternance en 2022 ? «Ce n'est pas pour ça que je suis là», tranche la Strasbourgeoise. «Pour moi, c'est une réunion de travail», reprend Hurmic en écho. Tout est dans le «pour moi».