La police a donc quelque chose à cacher. C'est la conclusion qu'il faut tirer de la présence de cet article 24 dans la proposition de loi sur la «sécurité globale» qui vise à restreindre la possibilité de photographier, de filmer et de diffuser des images des forces de l'ordre en action. Les promoteurs du texte, deux députés LREM, se défendent évidemment de vouloir l'interdire. Ils précisent que le délit créé ne concernerait, a posteriori, que les images diffusées «dans le but qu'il soit porté atteinte à l'intégrité physique ou psychique» d'un policier ou d'un gendarme. L'appréciation de ce que peut être une atteinte à l'intégrité physique ou psychique est suffisamment floue pour penser qu'il y a un loup. Les propos du ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, très explicite sur sa volonté de restreindre la diffusion de ces images de policiers ou de gendarmes en action, confirme que sous couvert de protéger les forces de l'ordre, cet article, s'il devait être adopté lors de l'examen de la loi prévu mardi, serait bel et bien une atteinte à la liberté d'informer, et plus largement à un droit démocratique essentiel. Comment imaginer dans un Etat de droit une police sans visage ? Que certaines activités policières très spécifiques soient incompatibles avec les sunlights se comprend aisément. Qu'il puisse y avoir des abus dans l'utilisation de certaines images, que certains manifestants cherchent par principe à provoquer, nuire, discréditer le travail des forces de l'ordre, est une réalité. Mais des lois existent déjà pour punir ces abus. Le gouvernement actuel s'obstine en revanche à refuser de parler de violences policières. Elles sont malheureusement aussi une réalité. Au lieu de prendre ce taureau républicain d'une police exemplaire par les cornes, le gouvernement laisse la place au soupçon de vouloir les cacher. Grave erreur. Car c'est l'inverse qu'il faudrait faire pour tenter de combler le fossé de défiance qui se creuse entre les forces de l'ordre et les citoyens.
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