Economiste spécialiste de la régulation de marchés à l’université Paris-Dauphine, ex-membre du collège de l’Autorité de régulation des télécoms (Arcep), Joëlle Toledano a publié cet été Gafa, reprenons le pouvoir ! (Odile Jacob). Dénonçant le retard des pouvoirs publics face aux géants du numérique, elle voit dans un nouveau mode de régulation à l’échelle européenne une occasion unique de reprendre l’initiative.
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Qu’a-t-on raté jusqu’ici dans la régulation des Gafam ? La Commission n’a-t-elle pas agi en condamnant Google pour abus de position dominante à trois reprises, pour un montant de plus de 8 milliards d’euros ?
L’Europe n’est pas restée inerte, mais elle n’a abordé le sujet que sous le prisme classique du droit de la concurrence et du «pouvoir de marché» des géants du numérique. Non seulement ces décisions ne sont pas définitives et vont prendre des années avant d’être validées par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) devant laquelle Google a fait appel, mais elles n’ont ni modifié fondamentalement son comportement ni permis de rétablir la concurrence dans les domaines incriminés.
Est-ce un aveu d’impuissance du droit ?
On a d'abord condamné des pratiques, mais a posteriori, sans se donner les moyens de rétablir une juste concurrence et un accès égal aux marchés du numérique. Il y a quelques semaines, 135 entreprises du Web ont encore écrit à Bruxelles en dénonçant le fait que Google continue de favoriser ses services dans les résultats de recherche. Comme si rien n'avait changé. Ils se plaignent notamment de l'opac