C'est l'affaire qui a fait dérailler le système. Pendant des années, les deux groupes «stups» de la prestigieuse Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED) ont multiplié les belles saisies et fait la fierté de Bercy, leur ministère de tutelle. La plupart des gros dossiers fonctionnaient de la même façon : les agents utilisaient leurs informateurs pour hameçonner des trafiquants et piéger ces derniers grâce à des «livraisons surveillées». Une technique légale qui permet, sous le contrôle d'un magistrat, de laisser passer de la drogue sans la saisir pour en suivre le cheminement et retarder les interpellations.
Mais de leurs aveux mêmes à la justice, des douaniers avaient pris l'habitude de laisser passer une ou deux cargaisons avant d'intercepter la marchandise au troisième voyage. Ce stratagème leur permettait de mettre en confiance les trafiquants tout en détournant une partie de la drogue pour rémunérer leurs «aviseurs», le nom donné aux indics dans le jargon douanier. Des méthodes encouragées par les chefs des groupes «stups» et largement connues de la hiérarchie, selon plusieurs témoignages recueillis par Libération.
«Rendre service»
En février 2010, suite à une nouvelle livraison surveillée autorisée par le parquet de Paris, trois trafiquants italiens sont interpellés dans la capitale avec 31 kilos de cocaïne. Mais l'opération, baptisée «Hard Rock Café», a été mal ficelée. Les Italiens auraient dû acheter une quantité plus importante à l'indic, qui lu