«Donnons la chance à ce couvre-feu.» L’exécutif tempère : pas de troisième confinement pour le moment. Devant l’inflation de rumeurs et de déclarations sur la dégradation de l’état sanitaire du pays, Gabriel Attal a démenti mercredi toute «évolution des restrictions nationales cette semaine». Vu l’évolution de l’épidémie, le porte-parole du gouvernement a pris soin de bien border sa déclaration à la sortie du Conseil des ministres. «Si la situation se dégrade, d’autres décisions pourraient être prises», a-t-il précisé. Selon la formule du Premier ministre, Jean Castex, la semaine dernière, le reconfinement, s’il devait être décidé, interviendrait sans délai. Car la France se trouve «sur une ligne de crête» : les contaminations sont sur un «plateau ascendant» et cela «appelle à la plus grande vigilance».
Selon les dernières données consolidées de Santé publique France, le pays a enregistré le 17 janvier plus de 18 000 nouveaux cas en 24 heures (en moyenne sur sept jours) et ce mercredi 316 décès à l'hôpital. Au total, 315 malades ont été admis en réanimation ce mardi, alors que la barre des 300 admissions quotidiennes n'avait pas été franchie depuis mi-novembre. Mardi soir, on dénombrait plus de 2 800 personnes hospitalisées en soins intensifs, pour la première fois depuis mi-décembre. Face à la persistance de ces mauvais chiffres – même si le virus circule moins en France qu'ailleurs en Europe – les Français semblent en avoir pris leur parti : ils sont 72% à penser qu'un nouveau confinement aura lieu prochainement, selon un sondage OpinionWay-Square publié en début de semaine par les Echos. De là à l'approuver, il y a un pas qu'ils ne franchissent pas : seuls 41% des personnes interrogées disent souhaiter ce troisième confinement.
Le mois de mars pourrait être «extrêmement dur»
Pour Karine Lacombe, infectiologue de l'hôpital Saint-Antoine à Paris, la France s'oriente tout droit vers cette mesure. «On est plutôt sur un plateau légèrement ascendant et on craint effectivement, dans les semaines à venir, qu'on ait une augmentation bien plus importante», a-t-elle expliqué mercredi sur BFM TV. Pour elle, le mois de mars sera «extrêmement dur». Une étude préliminaire réalisée par les chercheurs de l'Inserm indique qu'à la même période le variant anglais pourrait devenir dominant en France. Une situation qui préoccupe, car il est plus contagieux que le Sars-CoV-2 dit classique.
Une inquiétude partagée par le président de Samu-Urgences de France, le Dr François Braun, qui redoute une «troisième vague fatale» en mars, car la deuxième n'a pas assez reflué et «les mauvaises habitudes du passé sont revenues». Et l'urgentiste de rappeler que, malgré «les mesures prises», le virus continue de circuler «à un niveau élevé». Il souligne que les hôpitaux fonctionnent presque normalement, contrairement au printemps, où ils étaient en mode unique «anti-Covid», et que «les personnels soignants sont à bout de forces». «J'entends le citoyen qui râle à cause des gestes barrières, du confinement. Mais qu'il vienne un peu à l'hôpital ! Je pense à ceux qui n'ont pas de boulot. Pour eux, c'est infernal. Alors si chacun peut faire un petit peu…» alerte-t-il.
Une augmentation des contaminations aux nouveaux variants
Il faudrait «peut-être aller au-delà du couvre-feu» en termes de restrictions, a lui aussi suggéré Martin Hirsch, directeur général de l'AP-HP (Assistance publique-Hôpitaux de Paris) sur France Info. Selon lui, le nombre de contaminations aux nouveaux variants (britannique ou sud-africain) pourrait passer à 3% ou 4% des tests PCR rapidement, contre 1% selon les derniers chiffres cités par l'exécutif.
Le directeur général de l’AP-HP n’a pas caché ses craintes, notamment en évoquant le nombre de soignants contaminés. «C’était stable pendant les trois dernières semaines, mais ça augmente à nouveau cette semaine, a-t-il déploré. On en comptait 200 par semaine, là, je pense qu’on sera plutôt à 300 pour la semaine dernière, ce qui est un indicateur assez fiable de ce qui se passe dans la population générale.» Il espère, comme d’autres, l’enrayement de la dynamique du Covid-19 avec un renforcement des mesures restrictives, mais aussi l’accélération de la vaccination. Au 19 janvier, plus de 580 000 personnes avaient été vaccinées en France, dont 35 000 via l’AP-HP.