C'est la suite logique du mot d'ordre diffusé en masse sur les réseaux sociaux «je ne me reconfinerai pas», apparu suite à la rumeur d'un troisième confinement pour fin janvier. Des restaurateurs ont ainsi fait savoir qu'ils braveraient ce lundi l'interdiction de recevoir du public dans un acte qu'ils décrivent comme «de la désobéissance civile». Des personnalités et des groupuscules d'extrême droite sont en embuscade pour tenter de capitaliser sur cette colère face aux mesures sanitaires.
Au premier rang de ces récupérateurs, on retrouve Florian Philippot. Alors qu'il jouait en deuxième division depuis qu'il a quitté le Rassemblement national après la dernière présidentielle pour fonder les Patriotes, l'ancien bras droit de Marine Le Pen a retrouvé un second souffle avec la pandémie, et en accusant le gouvernement d'impréparation, d'incompétence et d'autoritarisme sur fond de complotisme. Depuis plusieurs semaines, il exhorte ses partisans à aller manifester devant le ministère de la Santé le samedi et commence à agréger jusqu'aux groupuscules les plus radicaux. Partisan de la désobéissance civile, il a appelé dimanche sur CNews les Français à «brûler leur masque» et a tweeté samedi, goguenard : «Et vous, avez-vous déjà choisi ce que vous voulez manger lundi au restaurant ?», appelant implicitement à se rendre dans les établissements qui ouvriraient leurs portes ce lundi.
Position cocasse
Outre les conspirationnistes forcenés, qui maintiennent que toute cette crise n'est qu'un complot, le mouvement séduit ainsi les franges les plus radicales, à l'image du néofasciste Yvan Benedetti, qui a appelé à soutenir les restaurateurs ouverts et à mettre fin à la «tyrannie sanitaire». Présent lui aussi à la manifestation de Philippot samedi, le leader du Mouvement national démocrate (ex-Dissidence française), Vincent Vauclin a lui aussi exhorté les Français à se «libérer» de la «dictature sanitaire» par la «désobéissance civile et non violente». Une position cocasse pour un groupe néofasciste qui prônait à ses débuts le renversement du pouvoir par un coup d'Etat militaire.
Même son de cloche du côté de l'Action française, qui tweete : «La #Desobeissancecivile est le cri des peuples qui ne veulent pas mourir des mesures liberticides qui anéantissent leur vie sociale».
Sur la messagerie cryptée Telegram, des groupes affinitaires radicaux forts de plusieurs milliers d'abonnés font également la promotion de ce mouvement, allant jusqu'à diffuser une carte des restaurants ouverts (qui était, ce lundi midi, encore désespérément vide et «en construction»…). Ils appellent en outre à la «fin du port du masque», «la fin des gestes barrières» et au «non-respect du couvre-feu». Ils dénoncent enfin une prétendue «terreur républicaine» après la menace du ministre de l'Economie Bruno Le Maire de suspendre le versement du fonds de solidarité aux restaurateurs qui ouvriraient leurs portes.
Le journal le Monde note enfin que le Rassemblement national «se tient à l'écart de ces mouvements de désobéissance trop éruptifs» car Marine Le Pen tient à ne pas entacher l'image d'un «parti de l'ordre» qu'elle a œuvré à dédiaboliser. Mais le RN se garde bien de condamner ces initiatives, laissant même certains de ses cadres envoyer des gages, comme s'il se tenait en embuscade.