Lanildut, envoyé spécial
En quelques minutes, un épais brouillard a gommé les maisons de granit réfugiées au fond de la crique. Seuls le rocher du Crapaud et l'écho des cornes de brume semblent encore veiller sur l'aber Ildut, cette langue de mer infiltrée dans les terres agricoles du Finistère. Lanildut, le «plus grand port goémonier d'Europe», subit la météorologie agitée d'une Bretagne nord brassée par le gros temps venu du large.
Entre deux rafales cinglantes et un «petit grain», le soleil d'été vient pourtant jouer épisodiquement avec les embruns des déferlantes qui meurent sur la plage. Les grues du quai Cambarell désert attendent le retour des petits bateaux multicolores partis dès l'aube moissonner leurs champs de goémon à quelques milles de la côte. «La purée ne les gêne pas, car ils ont tous des radars, rassure un mécano du chantier naval qui jouxte la grève. Le plus dangereux, c'est le ressac quand ils sont sur les cailloux!» (récifs).
De Paimpol (Côtes-d'Armor) à l'île de Sein (Finistère sud), 70 pêcheurs se consacrent six mois durant, de mai à octobre, à l'extraction des laminaires, une algue de 2 à 4 mètres de long destinée à produire des gélifiants et des farines alimentaires, des épaississants pour l'industrie textile et des produits cosmétiques. Un goémonier officie même au Guilvinec, en plein pays bigouden et, sur l'ensemble de la Bretagne, 1.200 hectares de champs sous-marins livrent leurs 60.000 tonnes de matière. La Bretagne a exploité les algues dès le Moy