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Interview

Salarié-entreprise, un couple en criseDeux experts expliquent comment le climat social s'est progressivement tendu.

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publié le 21 octobre 1995 à 9h04

Drôle d'époque. Alors que la négociation bat son plein (7.450

accords d'entreprise ont été signés en 1994 contre 6.540 l'année précédente), le climat social a rarement été aussi tendu. Selon une récente étude Sofres-Liaisons sociales (1), 64% des salariés considèrent que leur entreprise n'accorde aucune importance à leur avenir! Le climat vire à la désillusion. Comment en est-on arrivé là? Deux conseils en ressources humaines, Dominique Thierry, délégué général de Développement & Emploi, et Gérard Donnadieu, directeur d'études d'Entreprise et Personnel (2), analysent ce «divorce» salariés-entreprise. Pour eux, la vague des plans sociaux a traumatisé durablement les Français, qui ne croient «plus en rien». La fracture Dominique Thierry. Quelque chose s'est cassé entre 1990 et 1994. Pour l'expliquer, il faut remonter au début des années 80. Les socialistes découvraient l'économie et les salariés les contraintes de l'entreprise. Ils ont accepté le discours sur la compétitivité parce qu'ils pensaient que des entreprises saines contribueraient à résoudre le problème du chômage. La croissance des années 1987-1990 accréditait d'ailleurs cette idée. Et puis patatras! le deal est rompu avec la récession de 1992-1993. Les chefs d'entreprise renouent avec une vision très court terme et remplacent la compétitivité par la productivité en jouant sur une seule variable: les effectifs.

Gérard Donnadieu. Dans la tradition française, qui a duré des décennies, l'entreprise était mal aimée, c'