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Libération

Etats-Unis : délit d'insulte à tomate. Une loi permet de poursuivre quiconque dénigre sans preuve un aliment.

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publié le 1er avril 1996 à 4h46

New York,

de notre correspondant Une tomate accusée d'être bourrée de pesticides, un veau prétendument gonflé aux hormones ou une vache dénoncée comme folle ont-ils les moyens de se défendre? Aux Etats-Unis, la réponse semble être oui. Sous la pression des organisations agricoles, un nombre croissant d'Etats se dotent de lois «antidénigrement» destinées à protéger les aliments de ce qui, pour les être humains, releverait de la diffamation. Dans une douzaine d'Etats, dont la Floride et l'Arizona, quiconque critique publiquement des denrées périssables doit apporter «la preuve scientifique» de ses allégations sous peine du paiement de dommages et intérêts.

Le point de départ de ces lois est l'affaire alar, un produit chimique utilisé par les producteurs de pommes et devenu, pour les agriculteurs américains, le symbole de la campagne écologique qui tourne à la catastrophe économique. Utilisé afin de retarder le mûrissement des pommes et leur permettre de garder de bonnes couleurs, il avait été dénoncé comme cancérigène par une organisation de consommateurs. L'affirmation, reprise sur la chaîne de télévision CBS, avait entraîné un boycottage des pommes et jus de pomme et coûté environ 350 millions de francs aux agriculteurs de l'Etat de Washington, les premiers producteurs de pommes des Etats-Unis. Ceux-ci ont traîné CBS devant les tribunaux en affirmant que personne n'avait jamais prouvé la nocivité de l'alar. Pire: quand les autorités sanitaires ont confirmé l'autorisation du p