Au Brésil, l'Etat est décidément capable de tout, y compris
d'acheter des actions lui appartenant pour sauver une privatisation du naufrage au profit d'une société publique étrangère. Les conditions dans lesquelles EDF vient de prendre le contrôle de Light, la principale compagnie d'électricité de l'Etat de Rio (lire Libération du 22 mai), illustrent bien cette omnipotence qui se moque des paradoxes. Car c'est grâce à l'appui qui fait d'ailleurs jaser les gardiens du temple néolibéral de la Banque nationale de développement économique et social (BNDES), gestionnaire du Plan national de désétatisation (PND) lancé en 1990, qu'EDF a pu prendre pied sur un marché tenu pour «prioritaire»: sans les 9% du capital (complément nécessaire au transfert du contrôle actionnaire) acquis par la BNDES, l'adjudication de Light, expédiée en sept minutes mardi à la Bourse de Rio, était condamnée au bide.
Pour ce qui est du marketing international, cette privatisation aux forceps offrait au président social-démocrate Fernando Henrique Cardoso, un solide atout publicitaire avant la visite officielle qu'il a entamée en France hier (lire ci-dessous). Pourtant, un quart d'heure avant la mise à l'encan, José Serra, le ministre du Plan spécialement venu de Brasilia pour célébrer l'événement, n'en menait pas large. Pendant que, sous l'oeil amusé du chef de la délégation EDF, Jack Cizain, des syndicalistes distribuaient des bananes à l'entrée de la Bourse pour protester contre le «bradage» de Light, un