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Temps de travail: de la théorie à la pratique

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publié le 17 juin 1996 à 6h50

Peut-on compter sur la réduction de la durée du travail pour lutter

contre le chômage? Question fondamentale, à laquelle on ne peut espérer donner de réponse satisfaisante si l'on ne se met pas d'accord au préalable sur les causes du chômage lui-même. Pour simplifier l'analyse, on distinguera deux théories extrêmes du chômage, l'une qu'on qualifiera de néomalthusienne, l'autre de néomarxienne. Pour les théories néomalthusiennes, tout d'abord, la demande d'heures de travail est rigoureusement fixe. La «société» a besoin d'un nombre de services donnés (tant de coupes de cheveux, de voitures...), auxquels correspond un nombre donné d'heures à travailler. Dans un tel contexte, la réduction de la durée du travail crée mécaniquement une hausse de l'emploi, obligeant à partager entre un nombre plus grand de travailleurs le même nombre d'heures travaillées. Appliquée naïvement, cette théorie suggérerait de réduire de 10% la semaine de travail pour accroître de 10% le nombre d'emplois: la semaine de trente-cinq heures pour tous, et c'en serait fini du chômage.

A l'autre extrême, certaines théories établissent que ce n'est pas le nombre d'heures travaillées qui est la donnée «fixe», mais le taux de chômage lui-même. Ces théories se construisent sur un raisonnement qui n'est pas très éloigné de l'idée marxienne de l'armée de réserve industrielle. Pour ces théories, le chômage est un instrument de discipline de la classe ouvrière; il faut du chômage pour faire peur aux ouvriers. S'il n'y