16 heures. Odeurs de saucisses grillées et pétarades sous des
banderoles déployées au soleil. Les délégués syndicaux se relaient devant le micro: «Il faut stopper la logique de l'argent qui fait du licenciement un outil de gestion.» Constance, depuis vingt-quatre ans chez Moulinex, seule avec trois enfants, ne partira pas en vacances cette année. Ni Chantal, polyvalente sur la chaîne, ni Gérard, son mari, fraiseur, tous les deux depuis vingt-cinq ans à l'usine de Bayeux. Les allures de kermesse qu'avait prises la manifestation organisée hier devant le conseil régional de Caen par la CGT et la CFDT de Moulinex ne trompaient personne. Le coeur n'y était pas. La plupart des usines fermaient hier pour un mois de vacances, mais pour les quelque 200 salariés mobilisés l'été ne sera qu'«un intermède en attendant l'interlude», résume Françoise Jardin, déléguée CFDT de l'usine de Carpiquet.
«On devait partir trois semaines camper en Corrèze, on ne partira que huit jours: je n'ai pas envie qu'on emporte mon outil de travail pendant notre absence, alors je vais venir à l'usine.» Roland Lebas, 39 ans, délégué CGT et opérateur à l'usine de Cormelles (1.574 salariés) où «un emploi sur quatre en production va sauter», gagne 6.200 francs net après vingt ans de travail. Il rappelle qu'à «Lisieux, cette année, on a vu l'atelier d'une entreprise de métallurgie démonté en un seul week-end! On n'a pas envie qu'ils fassent pareil chez nous.» Alors, ils seront plusieurs à se relayer sur le site,