On n'imagine pas un café du Midi sans ces lanières de plastique
multicolores. Hélas, le marché s'est écroulé et les rideaux antimouches sont désormais faits de perles ou de lianes en peluche.
La serveuse le franchit droit devant. Transgression mille fois répétée entre la salle et la terrasse. Les lanières s'écartent mollement autour du plateau chargé d'apéritifs anisés. La dernière serpente autour de la carafe d'eau fraîche, puis disparaît derrière l'épaule. Le client l'écarte du bras pour se faufiler à l'intérieur. Mais pour les mouches indésirables, il constitue une barrière infranchissable.
Le rideau de lanières plastique et sa variante, agrémentée de perles multicolores, orne toutes les portes des cafés du Sud. Éternellement grandes ouvertes mais pourtant toujours étanches. Bleu azur ou arc-en-ciel, voire «Antilles» (marron), les lanières bruissent d'un cliquetis qui s'enfle au gré des rafales de mistral. Hors saison, quand le café est désert, le bruissement prévient le patron dans l'arrière-salle de la venue du chaland assoiffé.
Vendu 45 francs en droguerie, le rideau a conquis l'huis du particulier. Un client exigeant sur la qualité du rideau. Car abîmé, il peut devenir un tantinet griffant, voire coupant. Mouillé, c'est un baiser visqueux qui s'attarde sur les membres. Le modèle en plastique durait une génération sans broncher. Mais les violents orages fragilisent le rideau de perles, enfilées sur des ficelles. Au bout de quelques étés, la frange se fait inégale. Qu'une