Ils attendaient l'occasion depuis si longtemps que c'en était
presque touchant de les voir enfin réunis, sans crainte du politiquement incorrect, osant afficher leur exaspération face aux contraintes environnementales de plus en plus sévères, osant dire tout haut leur haine envers «l'intégrisme vert» et ses fidèles: les «écologistes», empêcheurs d'entreprendre, d'investir, de disposer de l'espace, bref, bousilleurs de «l'économie capitaliste bien comprise». «Ils», c'est-à-dire les industriels qui avaient répondu jeudi soir à l'appel quasi désespéré du PDG et du personnel de l'entreprise suisse Omya, publié dans la presse quotidienne française et stigmatisant la «dérive écologiste».
Omya, société minière, assure jouer sa dernière carte dans une affaire qui lui tient très à coeur à Vingrau, dans les Pyrénées. Après sept ans de guérilla juridique contre une population farouchement déterminée à ne pas voir détruire son cadre de vie, Omya craint de devoir abandonner définitivement un projet d'extension d'une carrière de carbonate de calcium, vital selon elle pour la poursuite de ses activités: «La zone d'extraction actuelle sera épuisée en l'an 2000. Il faut donc ouvrir dès maintenant l'exploitation du filon qui se prolonge sur la commune de Vingrau.»
Quel industriel un tant soit peu responsable, soucieux de présenter une bonne image de son entreprise, se serait risqué jusque-là à critiquer en public une prise en compte trop importante des questions d'environnement par la société?