Dans les pays anglo-saxons, on parle de «working poors» pour
qualifier toutes ces personnes qui n'arrivent pas à tirer de leur travail un revenu de subsistance. Pierre Concialdi, chercheur à l'Ires, Institut de Recherches Economiques et Sociales, parle lui de «pauvreté laborieuse» pour constater que celle-ci ne fait que progresser en France. De 11,4% en 1983, le pourcentage de salariés qui touchent moins de 4 866 frs par mois est passé à 15,1% en 1996. Cela veut dire que 2,8 millions de salariés ont aujourd'hui un salaire inférieur au Smic mensuel (5 239 francs nets). Soit près d'un sur six. Mais il y a plus grave, si tant est que l'on puisse, à ces niveaux de revenus, établir une hiérarchie entre le moins bien et le pire: c'est la progression de la catégorie des travailleurs très très pauvres. Celle qui touche moins de 3 650 frs nets par mois et dont le nombre a plus que doublé sur la même période passant de 5% à 10,1%. Phénomène durable. Et c'est là, selon l'expression de Jacques Freyssinet, directeur de l'Ires, «un phénomène majeur», d'autant plus préoccupant que les «working poors» le restent de plus en plus longtemps: la proportion de salariés qui perçoivent trois années successives un bas salaire a elle aussi augmenté de près de moitié. Ces études, qui selon Le Monde, seraient aujourd'hui reprises au sein de la Direction des études et statistiques du Ministère de l'Emploi (la Dares), ne font hélas que confirmer les précédents travaux de Pierre Concialdi qui les cosi