Menu
Libération
Interview

LA SOCIETE DU CHOMAGE. La grande mutation. La société du plein-emploi est-elle derrière nous? Faut-il imaginer des revenus sans contrepartie? Débat entre quatre économistes.

Article réservé aux abonnés
publié le 27 janvier 1998 à 17h06

Vendredi, Libération a accueilli quatre économistes d'orientations

très diverses ­ Alain Caillé, Daniel Cohen, Henri Guaino et Christian Saint-Etienne ­ pour débattre des suites à donner au mouvement des chômeurs sur le terrain de la réflexion.

Lionel Jospin oppose «société du travail» et «société d'assistance». Est-ce qu'il définit bien le problème qui se pose à la France aujourd'hui?

ALAIN CAILLÉ. Lionel Jospin formule le problème dans les termes qu'il croit être audibles par l'opinion publique. Travail d'un côté, assistance de l'autre. Mais il y a là un manichéisme qui bloque tous les débats politiques, une sorte d'incantation ­ l'appel à retrouver le plein-emploi ­ qui me fait penser à la fameuse phrase: «Encore un moment, monsieur le bourreau!» En fait, on sait bien que cette société de travail pour tous, à plein temps et pour toute la vie, est derrière nous. Elle est le seul modèle de renaissance sociale désirable que nous ayons encore en tête, alors qu'il faudrait faire son deuil, essayer d'imaginer autre chose. Brandir le spectre d'une dichotomie entre d'un côté une société de travail morale et fonctionnelle, de l'autre une société d'assistance vouée à toutes les dépravations, c'est une extraordinaire manière de dire: le débat politique ne bougera pas.

Si le gouvernement avait relevé les minima sociaux, cela aurait-il pu amorcer ce débat que vous souhaitez?

ALAIN CAILLÉ. La question des minima sociaux est un aspect particulier d'un problème beaucoup plus général: la cap