Les frères Saadé sont incorrigibles. Cela fait maintenant un an et
demi que Jacques et Johnny s'écharpent publiquement, depuis que leur entreprise familiale, la CMA (Compagnie marseillaise d'affrètement), a remporté la privatisation de la CGM (Compagnie générale maritime). Dernier épisode en date: Johnny Saadé, basé à Beyrouth, soupçonne Jacques Saadé, basé à Marseille et président en titre de la CMA, d'avoir mis au point un réseau de sociétés off-shore pour ponctionner la trésorerie du groupe, dans le plus grand secret. Mais le parquet de Nanterre, saisi de l'affaire depuis cinq mois, commence à y voir un peu plus clair.
Les deux frangins étaient associés dans une société commune, installée au Liban: CMA International SARL. Jacques en a les pleins pouvoirs de gestion. Mais, parallèlement, il montait à titre personnel plusieurs sociétés off-shore, dont une CMA International SAL (dite CMA-I), jouant sur la confusion des noms. Jacques Saadé a aussi créé une CMA bis (pour Container Management Advisors), toujours à titre personnel.
Des traces de virements bancaires en notre possession laissent à penser que Jacques a organisé des transferts de fonds de la CMA (l'entreprise maritime) vers CMA International (le holding familial), puis vers CMA-I (son holding perso). Sous réserve d'inventaire, plusieurs millions de francs se sont ainsi évaporés. Une partie de ces fonds est revenue à la case départ: ils ont permis au patron de la CMA de devenir majoritaire au capital, alors que Jac