La fondation Saint-Simon, club de réflexion très majoritairement
acquis à la monnaie unique, et République moderne, club politique très majoritairement hostile à Maastricht, tenaient séparément ce week-end un colloque sur le même thème: «L'euro et le modèle social européen». Jacques Delors présidait le premier, Jean-Pierre Chevènement clôturait le second. Problématique: en achevant d'unifier les marchés européens, la monnaie unique va-t-elle créer une compétition telle entre les entreprises et les Etats, que ce qui reste de ce «modèle européen» (un Etat-providence fort, des négociations sociales centralisées) va voler en éclats? Ou, au contraire, en unissant solidement ces pays, va-t-elle créer une dynamique de coopération permettant de bâtir un modèle commun plus solide?
On l'aura deviné, République moderne a insisté sur la première question et Saint-Simon sur la seconde. L'Europe, en tout cas, est déjà entrée dans cette dialectique-là, qu'un banquier saint-simonien (1) résume sous le vocable de «coopétition» (compétition + coopération).
Manque de coopération. La logique de confrontation est très forte: effacement des Etats (la monnaie unique neutralise la politique monétaire et bride la politique budgétaire), course à la baisse des coûts salariaux (le moyen désormais le plus évident pour gagner en compétitivité), concurrence fiscale et dumping social des Etats" La logique de coopération, en revanche, qui devrait pousser les pays européens à harmoniser leurs règles social