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Libération

Une monnaie inventée par l'Oncle Sam. Au lendemain de la guerre, le deutschemark remplace le Reichsmark.

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publié le 24 avril 1998 à 23h35

Le conclave était si secret que les délégués y étaient conduits en

voitures à vitres teintées. «Ils ne devaient pas savoir où ils étaient», raconte Dieter Lindenlaub, historien de la Bundesbank. C'est dans une ancienne caserne de la Wehrmacht, près de Cassel, qu'est né le deutschemark. D'avril à juin 1948, une dizaine d'experts, alliés et allemands y préparent le remplacement du Reichsmark par une nouvelle monnaie, pour faire redémarrer l'économie des trois zones d'occupation occidentales. «Au moins, ils se sont régalés avec les conserves de l'armée américaine, bien meilleures que ce qu'on trouvait à l'époque sur le marché», ironise l'historien de la Bundesbank. La monnaie devenue symbole du redressement et de la puissance économique allemande est née d'une initiative américaine. Elle commence même par un drame pour les épargnants allemands.

En juin 1948, chaque Allemand des zones américaine, anglaise et française ne reçoit que 40 deutschemarks, changés au taux de 1 DM pour 1 Reichsmark. Pour le reste les épargnants ne reçoivent que 6,50 deutschemarks pour 100 Reichsmarks. Alors que les prix, les loyers, les salaires et les retraites sont convertis 1 pour 1! «Ce fut très brutal pour les épargnants, raconte Dieter Lindenlaub. Près de 80% des biens détenus en espèce ont été anéantis.» La violence de la réforme assure pourtant son succès: l'argent, qui ne valait plus rien, se fait soudain rare et se réapprécie. Le troc et le marché noir, qui représentaient plus de la moitié des é