Ils sont entrés à la Bibliothèque nationale de France (BNF) du temps où elle était située rue de Richelieu. Emmanuel, Véronique, Pierre et les autres «nous avons été jusqu'à 300», disent-ils ont été recrutés en 1991 en contrat de chantier «pour effectuer des tâches relatives au transfert des collections de la bibliothèque sur son site actuel, pointer les livres un par un, notamment». Ils étaient censés rester trois mois: quelques-uns ont passé les concours et été titularisés, d'autres sont partis, mais 86 d'entre eux sont toujours là, toujours en contrat de chantier renouvelé tous les ans. Les cartons sont terminés, ils occupent aujourd'hui des postes de bibliothécaire, normalement réservés à des fonctionnaires. Evidemment, ils n'ont jamais été augmentés, beaucoup sont payés à des niveaux de salaires inférieurs aux emplois qu'ils occupent, leur ancienneté n'est pas reconnue.
Ce n'est pas faute d'avoir râlé. Car les «chantiers» à la BNF passent pour d'irréductibles Gaulois. Lorsqu'ils étaient encore rue de Richelieu, ils déboulaient des sous-sols et occupaient le hall à la moindre contrariété. Elles ne manquaient pas: «On était payés le 18 du mois, on n'avait pas les même congés que les autres, etc.» En 1994, alors que leur mission initiale touchait à sa fin, ils ont créé un collectif des non-titulaires de la BN et se sont battus pour obtenir d'autres missions. Petit à petit, leur base s'est élargie, des CES, vacataires et autres CDD les ont rejoints. Explosion de non-ti